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1679 – THIONVILLE – Inventaire des biens de François Claude Hue de Saint-Rémy

Publié le par Persin Michel

François Claude Hue de Saint-Rémy, lieutenant civil et criminel au bailliage de Thionville, décède en son domicile le 15 mai 1679, il est inhumé le 16 mai à 19h en la chapelle Notre Dame des révérends pères Augustins de Thionville.

 

Le lendemain de l’inhumation, le 17 mai 1679, les gens du bailliage vont à la maison du défunt pour ouvrir la cassette (voir article précédent) et prendre connaissance du testament.

 

Le dernier jour du mois de mai 1679, vers les 3 heures de l’après midi,  Jean Nicolas  Bock, conseiller du roi et lieutenant particulier au bailliage, procède sur requête de la veuve Marie-Thérèse de La Cour, à l’inventaire et estimation des biens du défunt, comme stipulé dans le testament.

 

L’inventaire se fait en présence de deux marchands de la ville chargés de l’estimation des biens, il s’agit de Pierre Scharff et Nicolas de la Mothe.

 

L’opération débute le 31 mai 1679, par une chambre haute donnant sur la rue,  en présence des protagonistes ci-dessus, auxquels il faut ajouter, le sergent ordinaire du bailliage, Bastien Sias.

 

Cette chambre est celle de la veuve, Marie-Thérèse de La Cour, l’on y trouve les biens suivants :

  • - 10 chaises et 2 fauteuils avec des housses de ratine [1] rouge garnies de franges de soie estimés à une demie pistole la pièce, soit 6 pistoles ou 66 livres tournois.[2]
  • - 1 garniture de lit de 7 pièces et 1 tapis de la même couleur et avec les mêmes franges que les chaises, estimés à 20 écus blanc à 3 livres l’écu soit 60 livres.
  • - 2 matelas de laine dont un couvert de toile de Cologne et l’autre de toile ordinaire et sur lequel se couchait la dame, estimés à 2 pistoles d’or soit 22 livres.
  • - 1 lit de coin estimé à 22 livres.
  • - 1 paillasse estimée à 3 livres.
  •  - Une courte pointe piquée en coton estimée à 2 pistoles soit 22 livres.
  • - 1 traversin et 2 oreillers estimés à 9 livres.
  • - 1 châlit en bois de chêne estimé 6 livres.
  •  - 4 pommes de lit et des cloches de soie estimées à 12 livres.
  •  - 2 chenets de potin [3] estimés à 44 livres
  • - 1 petit rafraichisseur de rosette estimé à 3 livres
  • - 1 grille de fer à faire brûler le feu estimée 3 livres.
  • - 2 tablettes différentes de bois de noyer, bien façonnées et tournées estimées 12 livres.
  • - 1 cadre de bois avec Saint-François estimé 11 livres.
  • - 1 cadre en bois avec le Bon Dieu et la Vierge estimé 5 livres et 10 sols.
  • - 1 petit cadre en bois avec Sainte-Madeleine estimé 3 livres
 

[1] Ratine, tissu de laine dont les fils sont frisés.

[2]  Les livres sont toujours des livres tournois sans qu’il soit besoin de le préciser.

[3] Potin, alliage de cuivre et d’étain parfois de plomb .

  • - 1 cadre avec un paysage estimé 6 livres.
  • - 1 « Salutor mundi » [1] dans un cadre estimé 3 livres
  • - 1 petite table de noyer estimée à 6 livres.
  • - 1 miroir pliant estimé à 5 livres.
  • -  1 cassette de cuivre dorée estimée à 4 livres.
  • - 2 guéridons estimés 4 livres 10 sols.
  • - 1 cassette avec 24 serviettes assez fines et 3 nappes le tout estimé à 36 livres.
  • - 1 paire d’éperons en cuivre estimés 30 sols.
  • -  1 cabinet de noyer estimé 6 livres dans lequel nous avons trouvé des cuillères, fourchettes, écuelles,  salières, mouchettes [2], pot à eau le tout en argent au poinçon de Metz et un grand gobelet en argent d’Allemagne, tout cela estimé à 140 écus blancs soit 420 livres.
  • - 1 petite et vieille cassette encore scellée dans laquelle il n’y a que des papiers concernant le bailliage, estimée à 3 livres.
  • - 1 vieille chaise et & tabouret estimés à 13 sols.
  • - 1 tapisserie murale de Bergame [3] assez usée estimée à 18 livres.
  • - 2 rideaux de toile devant les fenêtres estimés à 6 livres.
  • - Un bague qui n’est pas en diamant estimée 12 livres.

Ce qui pour cette première chambre haute donne une estimation de 832 livres tournois sans y compter les sols.

 

Le 2 juin 1679, inventaire du poêle en bas de la maison où est décédé François Claude Hue de Saint-Rémy..

  • - 8 chaises et 1 fauteuil garnis de tapisserie assez vieille estimés à 6 escalins soit 25 livres et 5 sols.
  • - 1 table et 1 vieux tapis vert estimés 4 livres 15 sols.
  • - 2 cadres avec un paysage estimé 30 livres.
  • - 1 vieux tableau de l’adoration des rois mages estimé 3 livres.
  • - 1 tableau avec Saint-Luc sans cadre estimé 1 livre.
  • - 2 tableaux à l’huile estimés 4 livres.
  •  -1 lustre simple en bois argenté estimé 3 livres.
  • - 1 portrait de monsieur le doyen de Saint-Sauveur de Metz, non estimé.
  • -

Voilà l’estimation, pour le « poêle » en bas de la maison, qui est de 70 livres.

 

Ensuite nous avons été dans la cuisine en bas à coté du « poêle » où nous avons trouvé ce qui suit :

  • -  1 rafraichisseur estimé 3 livres.
  • - 5 chaudrons d’airain [4], grands et petits avec un chandelier, 2 poêllons, 2 cuillères et 1 fourchette à pot, 1 passoire,  le tout en airain estimés 18 livres.

[1]  « Salvator Mundi » C’est un représentation du Christ bénissant de sa main droite voir illustration par Léonard de Vinci

[2]  Petits ciseaux en argent que l’on  posaient sur un petit plateau

[3] Ces tapisseries généralement grises ou rouges avaient assez peu de valeur et servaient à décorer les murs.

[4] C’est un alliage de cuivre généralement c’est du laiton ou du bronze

"Salvator Mundi" tableau de Léonard de Vinci

"Salvator Mundi" tableau de Léonard de Vinci

  • - 2 pots de fer, 1 petit chaudron, 1 crémaillère, 3 chenets fort petits,  1 poêle, 1 pelle à feu, 1 lèche frite, 1 grille et 3 broches avec divers plats, le tout estimé à 5 écus blanc et 3 escalins soit 16 livres 2sols.
  • - 1 coquemar estimé à 9 livres.
  • - 2 tourtières d’airain avec couvercles estimées  7 livres 10 sols.
  • - 1 grande armoire de cuisine bien vieille estimée 9 livres

Voilà la cuisine estimée à 53 livres tournois.

 

Derrière la cuisine, nous avons trouvé une petite dépendance contenant :

 

- 1 garniture de lit, blanche, avec des franges, le tout assez vieux, estimée 15 livres.

  • - 1 coffre contenant 6 paires de linceuls forts grands en fine toile de chanvre estimées à 40 livres.
  • - 1 coffre de bois avec du linge estimé 7 livres.
  • - 1 lit de plume avec une paillasse pour coucher le domestique estimé 7 livres 10 sols.
  • - 1 vieux coffre de sapin estimé 6 escalins soit 2 livres 5 sols.

 

Voilà pour la dépendance estimée à 71 livres tournois.

 

Le 3 juin 1679, nous sommes descendus à la cave où nous avons trouvé ce qui suit :

  • - 5 tonneaux de vin, dont 1 de 5 hottes, 1 de 6 hottes, 2 de 7 hottes et 1 de 8 hottes, la hotte vaut 1é escalins soit 148 livres 10 sols.
  • - 1 lit avec ses garnitures, traversin, oreillers et aussi 12 chaises et 2 fauteuils en bois de rose avec encore un tapis, le tout estimé à 600 livres.

La cave est donc estimée à 748 livres.

 

Ensuite nous sommes montés à l’étage estimer une deuxième chambre :

  • - 1 grande armoire de sapin, 1 table, 1 tapisserie de Bergame, le tout pour 7 pistoles soit 77 livres..
  • - 1 plat, 1 bassin, des assiettes et aiguières en étain estimés 36 livres 8 sols.
  • -  9 grands plats, 6 plats moyens, 6 assiettes creuses et 3 plates, une aiguière, 2 pots de chambre, le pot en étain à la fleur de lys, le tout  estimé 96 livres 18 sols.
  • - 3 chainettes estimées 15 livres.
  • - 1 rafraichisseur d’airain estimé 4 livres 10 sols.
  • - 1 passoire de cuivre estimée 1 livre 10 sols.
  • - 2 tasses en potin estimées 4 livres 10 sols.
  • - 1 lot de pots de cuivre et marmites estimés 6 livres.
  • - 1 grand plat et bassin d’airain, bien battu et façonné estimés à 22 livres.
  • - 1 grande armoire de sapin qui contenait les pots ci-dessus estimés 6 livres 15 sols.

L’estimation pour cette chambre est de 267 livres tournois.

Au même étage nous avons estimé une troisième chambre donnant sur l’arrière :

  • - 1 bahut avec 9 paires de draps de chanvre estimés à 121 livres 10 sols.
  • - 1 ensemble de draps et serviettes et nappes estimé à 90 livres.
  • -  1 bahut estimé à 7 livres 10 sols.
  • - 12 chemises du défunt qui vont servir aux enfants, non estimées.
  • - 8 petits tableaux estimés 3 livres.
  • - 1 paire de pistolets gainés à l’antique assez beaux avec une petite épée à la poignée d’argent, non estimés.
  • - 1 banc en forme de couchette estimé 6 livres.
  • - 1 autre bahut estimé 3 livres.
  • - 1 petite table pliante en sapin estimée 12 sols.
  • -  1 bois de lit en chêne estimé 7 livres.
  • - 1 grande poêle d’airain, 4 bassins d’airain pour faire les confitures,  estimé 24 livres.

Cette troisième chambre est donc estimée à 273 livres tournois.

 

Puis nous sommes allés estimer le grenier :

  • - 5 couvertures, blanches et vertes estimées 18 livres.
  • - 1 couverture piquée estimée 4 livres 10 sols.
  • - 1 lit de Conti avec le traversin estimé 33 livres.
  • - 2 oreillers en toile rayée estimés 4 livres 10 sols.
  • - De vieux sacs estimés 25 sols.
  • - 1 petit matelas estimé 4 livres 10 sols.
  • - 4 ou 5 bichets de farine et 2 bichets de froment, non estimés.
  • -  Une trentaine de livres de pratiques juridiques et autres comme par exemple :
    • Les arrêts notables du parlement de Toulouse
    • La coutume générale de l’évêché de Metz
    • La vie des hommes illustres grecs et romains
    • Le traité des droits honorifiques des seigneurs d’église
    • Les discours politiques.
  •     Ces livres n’ont pas été estimés.
  •  

Ce qui pour le grenier donne une estimation de 63 livres

 

Les biens contenus dans la maison du défunt sont estimés à 2377 livres.

 

Ensuite,  la dame Marie-Thérèse de La Cour, veuve du défunt, nous a fait l’état des dettes, tant actives (se rajoutant à la succession)  que passives (se soustrayant de la succession)

 

Dette actives :

  • - 4000 francs messins [1] dus par monsieur le doyen de Saint-sauveur de Metz par contrat de constitution du 30 juin 1673 chez le notaire Helminger.
  • - 130 livres dues par le même doyen prêtées sans promesse.
  • - 650 livres qu’il lui restent de la vente de la métairie de Choissel
 

[1] Equivalant à 2000 livres tournois

  • - 1600 francs barrois [1] dus par le sieur Moutot de Toul, elle n’a aucun papier mais espère trouver auprès du chanoine de Toul quelques preuves.
  • - 130 écus blancs soit 390 livres pour du vin vendu par Pierre Parisot et Marie Schlegler sa femme  sans promesse signée.
  • - 4 maldres de blé dues par le sieur Wilhius dont le sieur Limpach a répondu.
  • - 18 escalins dus par le sieur Girard de Yutz.
  • - 7 livres dues par Jean Leuchen de Sentzich.
  • - 18 écus blancs soit 54 livres dues par le sieur Ottring.
  • De plus la dame déclare que les enfants ont des prétentions provenant de la succession de leur grand père de Normandie. Prétentions qu’elle tâchera d’appuyer pour le profit des enfants, elle se dit prête à faire le voyage.

 

L’ensemble des dettes actives venant augmenter la succession se monte à environ 4000  livres tournois qu’il faut donc ajouter aux 2377 livres de la succession soit 6377 livres tournois.

 

Dettes passives :

  • - 4 écus blancs soit 12 livres prêtés par le sieur Edinger, échevin de la ville, à son mari.
  • - 3 écus blancs soit 9 livres dues au sieur Limpach, avocat.
  • - 6 écus blancs soit 18 livres dues à Jean Louvrier, maréchal ferrant
  • - 6 écus blancs soit 18 livres dues à Meyer Schwabe, juif.
  • - 5 écus blancs soit 15 livres dues chez un boulanger.
  • - 25 écus blancs soit 75 livres dues pour le loyer de la maison.
  • - La dame précise que les obsèques seront payées sur la succession et que les habits du défunt ont été donné à des pauvres « honteux » sauf un juste au corps de velours, fort usé, estimé à une demie pistole.
  • - La robe  du palais [2], la dame ne veut pas s’en séparer, mais l’estime à 1 pistole.

 

L’ensemble des dettes passives, qui viennent en déduction de la succession, se monte à environ 130 livres tournois, ce qui laisse une succession nette de 6247 livres tournois.

 

La dame précise encore que la charge de lieutenant civil et criminel de la ville de Thionville  a une grande valeur [3] qu’elle jugera utile de vendre à son avantage et qui viendra augmenter la succession.  Cette charge est estimée à environ 6000 livres ce qui laisse donc une succession  totale d’environ : 12247 livres tournois.

 

Voilà qui clos l’inventaire et l’estimation des biens de François Claude Hue de Saint-Rémy,.

 

Fait à Thionville le 3 juin 1679, en présence des personnes citées ci-dessus.

 

[1] Equivalent à 1066 livres tournois

[2] C’est la robe liée à la charge de lieutenant civil et criminel, comme celle d’un avocat

[3] Nous verrons plus loin à quel prix elle vendra cette charge

Pour rappel : (Voir les articles précédents)

 

L’estimation des biens du riche marchand de Thionville :  2000 livres tournois.

L’estimation des biens du tisserand d’Elange : 130 livres tournois.

L’estimation du notable de noble extraction :  12247  livres tournois .

 

Mais voyez vous, l’ Histoire n’étant que l’expression de la vraie vie, j’ai retrouvé un autre acte intéressant, venant clore  momentanément cette histoire.

 

Le 14 août 1679, Marie-Thérèse de La Cour, veuve de François Claude Hue de Saint-Rémy, décédé le 15 mai 1679, soit après trois mois de veuvage, va signer une convention de mariage avec Jean Baptiste Aubry, avocat au parlement de Paris, fils de Poncelet Aubry.

 

Bien entendu, ils se marieront  dans la religion catholique, ils mettront en commun leurs meubles et immeubles.

 

Le marié apportera avec ses parents la somme de 11000 livres tournois, 2000 en argent, 6000 en héritages et le reste à crédit.

 

La mariée apportera 4950 livres tournois venant de la succession  dues par des particuliers et la charge de lieutenant civil et criminel de Thionville qu’exercera alors le nouvel époux [1], mais qu’il pourra aussi revendre.

 

NB : En 1701, la charge de lieutenant civil et criminel au bailliage de Thionville était entre les mains de François George de Clemecy, seigneur d’Inglange.

Etienne Hue de Saint-Rémy né en 1671, fils de François Claude Hue de Saint-Rémy , fut reçu avocat au parlement de Metz le 5 mai 1692 puis devint Lieutenant général au bailliage de Thionville le 10 septembre 1702, charge qu’il exerçait encore en 1728

 

Après cette trilogie parfois un peu indigeste, mais intéressante, je vais prendre moi aussi quelques vacances et nous nous retrouverons en octobre 2017 pour de nouvelles trouvailles sur l’histoire de notre ville et de nos villages.

 

[1] On peut estimer la charge à 6100 livres tournois.

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