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1482 – Thionville, la chapelle Saint-Michel (Fin)

Publié le par Persin Michel

D’après quelques auteurs anciens, le chœur de cette ancienne église Saint-Maximin de Thionville aurait été reconstruit vers 1500 [1] et les murs de la nef réhabilités en gothique flamboyant pour remplacer l’église d’origine, de style roman, datant de 1123, comme semble l’indiquer une inscription sur une pierre retrouvée en 1755 lors de la destruction de l’église.[2]

Une autre hypothèse, serait que l’église romane primitive de Thionville, dédiée à Saint-Eustache se trouvait rue brûlée. Un important incendie l’ayant détruite avec les 2/3 de la ville vers le 15ème siècle, ce qui serait à l’origine du nom de la rue « Brûlée ». L’église aurait alors été reconstruite en style gothique à l’emplacement du parvis actuel de l’église Saint-Maximim.

Au moins une de ces hypothèses est vraie. Alors, nos ancêtres n’étant pas spécialement idiots, ont probablement réaliser les travaux de construction ou de reconstruction du chœur et de la nef, en même temps que les travaux de construction de cette chapelle Saint-Michel soit vers 1479/1485, la chapelle ayant un mur mitoyen avec le chœur de l’ancienne église [3].

De nombreux documents anciens nous apportent la certitude que la chapelle Saint-Michel dite de l’ossuaire se trouvait bien accolée sur le côté droit du chœur de l’église, en relation directe avec le cimetière et l’ossuaire.[4]

Ainsi, Charles Abel dans son histoire de Thionville [5], nous dit que les chapelles de Notre-Dame, Sainte-Croix, Sainte-Anne et Saint-Jean-Baptiste occupaient l’intérieur de  l‘église et la chapelle Saint-Michel contigüe au chœur, donnait sur le rempart. [6]

Ces chapelles intérieures n’étaient pas de simples autels qu’on aurait plaqués contre les murs de l’église, comme c’est souvent le cas. Non, c’était de véritables petites chapelles qui faisaient saillies sur l’extérieur de l’église et pouvaient contenir entre 25 et 10 personnes. Elles avaient un plafond voûté et leur autel était parallèle au maître autel situé dans le chœur. La plus belle de ces chapelles était  celle de la Sainte-Croix.

Peu après 1626, une cinquième chapelle fut ajoutée, elle était dédiée au Saint-Sacrement. [7]

 

 

[1] Sans aucune certitude sur cette date.

[2] Cette date de 1123 est peu crédible car non prouvée.

[3] Effectivement cela met bien cette construction ou réhabilitation de la première église Saint-Maximim, aux alentours de 1500.

[4] ADM la série 29J et le fonds Braubach GG18 A vol XIX CH 1

 aux archives municipales de Thionville 

[5] Manuscrit à la bibliothèque municipale de Nancy – 1860.

[6] Charles Abel, notable et historien Thionvillois, né le 2//12/1824 et décédé le 02/05/1895. Docteur en droit en 1847. Auteurs de nombreux articles sur l’histoire régionale.

[7] Il y avait de nombreuses chapelles à Thionville soit internes à des églises ou à des bâtiments comme le beffroi ou l’hôpital des pauvres, soit isolées comme Saint-Pierre, Sainte-Anne, Saint-François et d’autres encore plus petites, proches d’un oratoire.

 

Nous  allons voir grâce à un document exceptionnel ayant appartenu à Charles Abel et aujourd’hui propriété de monsieur Dominique Laglasse, où se trouvait exactement la chapelle Saint-Michel qui en fait avait été reconvertie en sacristie. Nous verrons aussi de façon détaillée l’ancienne église de Thionville et son environnement.

Plan de l’ancienne église de Thionville avec son environnement immédiat daté de 1750, propriété de Charles Abel en 1884, actuellement dans la collection de Dominique Laglasse,  archiviste, de Thionville

Plan de l’ancienne église de Thionville avec son environnement immédiat daté de 1750, propriété de Charles Abel en 1884, actuellement dans la collection de Dominique Laglasse, archiviste, de Thionville

Dans les petit rectangles marquées d'une croix sont les chapelles et leur autel

Le rectangle au milieu tout en haut est le maître autel

 En haut à gauche = Notre Dame - En haut à droite = Sainte-Croix

Au milieu à gauche = Sainte-Anne  - Au milieu à droite  = Saint-Jean Baptiste

Tout en bas à gauche = Saint-Sacrement

A gauche de l'entrée principale, se trouve l'escalier qui mène à la crypte et à l'ossuaire.

A droite en entrant, on trouve l'escalier qui monte au clocher.

On voit sur ce plan de 1750, soit cinq années avant sa destruction, que la chapelle Saint-Michel est devenue la sacristie de l’église.

Plusieurs visites pastorales [1] de cette église mentionnent que la sacristie est insalubre car elle touche pratiquement aux terres du rempart qui se trouve derrière, amenant des eaux de ruissellement et que le plancher en est pourri par l’humidité amenée des tombes qui se trouvent sous ce plancher. On y voit aussi qu’une tombe brisée se trouve juste à l’entrée de cette sacristie.

On notera le cimetière qui se trouve sur le coté droit de l’église avec une entrée latérale dans l’église. On remarque aussi que la porte de l’ancienne chapelle Saint-Michel à cette époque sacristie, donne bien dans le cimetière.

 


[1] De 1696 à 1754, de valeur inégale en fonction de la personne qui conduisait la visite et s’attachait à certains aspects plus qu’à d’autres. 

Ce cimetière fut créé en 1521 comme l’atteste le document suivant :

« le 12 janvier 1521, deux échevins de la ville attestent que les enfants de Johan von Dickirchen, échevin de Thionville, ont donné à la nouvelle confrérie, leurs droits sur une place inculte près de la chapelle Saint-Michel pour y établir un cimetière à l’église paroissiale »

Il est à remarquer que le cimetière est très petit et ne peut contenir plus de 150 corps, ce qui obligeait à faire régulièrement de la place en transférant les ossements dans l’ossuaire sous l’église. Le problème se reposera plus tard dans la nouvelle église.

Ainsi en 1733, une visite pastorale note que des crânes et des os sont entreposés jusque sous l’escalier menant à la crypte et sont visibles de la rue. Qu’il faudra donc construire un ossuaire dans le petit cimetière afin de solutionner ce problème,[1] ce qui fut fait par la suite.

Pour être très explicite sur ce sujet, lors du démantèlement des remparts de la ville en 1903 par les allemands, on a retrouvé les fondations de cette ancienne église, avec une partie des colonnes et des murs du chœur qui montrent bien la chapelle Saint-Michel.

Mais aussi, c'est soixante tombereaux de squelettes qui furent retirés de l'ossuaire et transférés au cimetière Saint-François. On a examiné un peu ces squelettes qui pratiquement tous, étaient ceux de jeunes hommes, plutôt grands et en bonne santé avec des dents très saines. Sans aucun doute de jeunes soldats tués lors des différents sièges de la ville.

De nombreux notables de Thionville se faisaient inhumer dans leur caveau familial dans cette église, les registres paroissiaux de la ville en font foi. Certains, se faisait inhumer dans l'église des Augustins, d'autres au cimetière Sainte-Suzanne, hors la ville à Saint-Françoi, mais nous reparlerons de ces différents cimetières dans le prochain article.

Sur le coté droit de cette église, vis à vis du cimetière, il y avait un grand bâtiment appartenant au sieur de la Roche, avec ses dépendances et son jardin à l’arrière. Ce bâtiment touchait au rempart côté Moselle comme la chapelle Saint-Michel et il était mitoyen vers la ville avec la maison du sieur Limbourg, elle même mitoyenne avec la maison de la cure ou presbytère et son jardin à l’arrière.

 

[1] A cette époque, les règles sanitaires et la relation des habitants avec les morts, poussent à la disparition puis à l’interdiction de ces ossuaires

Revenons à l’église, comme je l’ai dit précédemment, lors de la destruction des fortifications de la ville en 1903, les fondations du chœur de cette église furent retrouvées. (Plan ci-contre)

Le chœur avait une forme plus arrondie, plus profonde, on a sans doute tronqué une partie de celui-ci lors d’un élargissement des remparts. Les colonnes qui soutenaient la voûte étaient finement travaillées montrant de façon explicite la nature gothique de l’édifice.

 

Extrait d’un relevé des fondations par Massonnet  (Archives municipales de Thionville)

Extrait d’un relevé des fondations par Massonnet (Archives municipales de Thionville)

Pour terminer, je voudrais mentionner le rapport du 24 janvier 1725, commandité par l’évêque de Metz afin de voir si cette église était encore à même de suffire aux besoins de la population de Thionville. Ce rapport fut précédé d’une expertise in situ menée par  Gilles Bonnard, prêtre, docteur en théologie à la faculté de Paris, chanoine trésorier de l’église de Metz en compagnie d’Alexandre, archiprêtre et curé de Thionville. Eux mêmes accompagnés par monsieur de Brillac [1], gouverneur de la ville avec quelques officiers et ingénieurs [2] de la ville.

Cette visite très détaillée, nous donne les dimensions de l’église qui sont les suivantes :

Le chœur fait environ 12 m de longueur sur une profondeur de 4 mètres y compris le maître autel ce qui ne laisse pratiquement plus de place pour y mener correctement les cérémonies quand le clergé et ses desservants sont autour de l’autel. [3]

La nef fait environ 24 m de longueur sur 14 m de largeur devant le choeur et seulement 10 m vers la porte d’entrée, en y comprenant les chapelles qui sont séparées entre elles par de gros piliers ou jambages.

La chaire à prêcher est desservie par un escalier de pierre fort imposant.

A l’entrée se trouve une tribune haute, faisant 4 m de profondeur sur la largeur de l’église et soutenue par deux piliers.

L’espace libre entre tous ces éléments est donc peu logeable, de plus, l’église est en assez mauvais état général.

Elle peut contenir tout au plus, 1000 à 1100 personnes mais dans des conditions de confort relatif.

Or, il se trouve que la population de la ville est de 3000 personnes sans compter la garnison qui se monte à 2150 hommes en période calme et peut monter à 5000 personnes lors des périodes de guerres.[4]

Lors des grandes cérémonies les officiers et leur valet occupent toutes les places et les bourgeois de la ville restent au dehors alors qu’eux ont payé leur banc. La population gronde et l’agrandissement de l’église est jugé impossible ne pouvant s’étendre vers le rempart qu’elle touche presque, ni vers la ville où se trouve la tour des habitants (le beffroi) qu’il est impossible de détruire.

Il fut donc convenu que la construction d’une nouvelle église était la seule solution et qu’il fallait s’y employer.

 

[1] François de Brilhac, maréchal de camp commandeur de l’ordre de Saint-Louis. Gouverneur de Thionville pendant 7 années et décédé à Thionville le 14 septembre 1731.

[2] Dont Cormontaigne.

[3] Les mesures sont données en toise, une toise = 6 pieds = 1,959m environ

[4] La garnison se compose de 2 escadrons et 3 bataillons, 2 français et 1 suisse soit environ 1800 hommes et 200 officiers. Il y a aussi une brigade d’officiers réformés de Bavière et 150 valets pour les officiers soit 2150 hommes en période calme.-

 

Après de nombreuses péripéties, la ville rachètera en 1755, les maisons des sieurs de La Roche, Limbourg et le jardin du sieur de Latouche [1] . Elle fera construire en 1756 la nouvelle église Saint-Maximim. 

 


[1] Marie Madeleine le Brun veuve de Jean François de la Roche Girault , écuyer et seigneur de Bétange, ancien capitaine d’infanterie. Jacques François de la Roche Girault, écuyer et seigneur de Bétange, commissaire d’artillerie à Thionville et enfin Suzanne de la Roche Girault.

Le sieur Limbourg était procureur du roi en la maitrise des eaux et forets.

Le sieur de Latouche était conseiller du roi au bailliage.

 

En dehors des bâtiments à usage militaire, Thionville avaient beaucoup de bâtiments à usage religieux et l'histoire de ces bâtiments bien que complexe à reconstituer est très intéressante pour cerner l'histoire de la ville et de ces habitants pour qui la religion fut d'un grand secours dans les périodes difficiles que traversa la ville. Les chapelles ou autels furent nombreux tout comme les confréries qui finirent pour certaines d'entre elles par être interdites.

Littéralement on ne savait à quel saint se vouer !

 

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1482 - Thionville, la chapelle Saint-Michel (suite)

Publié le par Persin Michel

Le titre de l'article précédent utilisait le terme d'église Saint-Michel, mais le terme de chapelle est plus indiquée.

Nous avons vu précédemment la fondation et la dotation de cette chapelle Saint-Michel, nous allons voir maintenant où se situait cette chapelle.

Pour cela, le texte précédent ne nous donne qu’un seul indice :

 «  …voulant aussi accomplir la volonté de cette défunte, nous avons (décidé) de parachever et accomplir une chapelle qui était commencée en partie à être édifiée et mise en perfection dans un lieu contigüe de la paroisse en l’honneur de Dieu et de la bienheureuse Vierge Marie et de Saint-Michel l’Archange, Saint-Pierre prince des apôtres, de Saint-Etienne premier martyr, de sainte-Agathe et Sainte-Lucie, vierges… »

Nous savons donc, que cette chapelle dont la construction était commencée [1] ,fut parachevée en 1482 et qu’elle se trouvait dans un lieu contigüe de la paroisse.

Le terme paroisse employé ici peut prêter à confusion. Aujourd’hui une paroisse désigne à la fois une aire géographique précise, le « territoire de la paroisse », et un groupe de personnes habitant sur ce territoire et constituant la communauté paroissiale.

Bien évidemment, on ne peut pas construire une chapelle contigüe à ce genre d’entité administrative  et humaine. De plus à Thionville, il n’y avait qu’une seule paroisse, celle de Saint-Maximim, dont dépendait plusieurs églises [2] ou chapelles [3].

Il faut donc comprendre ici le terme de paroisse, comme désignant « l’église paroissiale », c’est à dire l’église principale de la paroisse, donc l’église Saint-Maximim. On a donc construit cette chapelle de façon contigüe à l’église Saint-Maximim. Fort bien, mais voilà l’église Saint-Maximim de l’époque, n’était pas l’église Saint-Maximim d’aujourd’hui, aussi nous allons partir de l’église que nous connaissons et où il n’existe pas de chapelle contigüe  pour remonter dans le temps et voir si nous retrouvons cette autre église avec une chapelle contigüe.

 


[1] Probablement en 1479.

[2] L’église paroissiale de Thionville alors Saint-Maximim et l’église de Guentrange

[3] Celles des Augustins, Capucins, du Rosaire, de Saint-Pierre, de Sainte-Anne, de Saint-François entre autres.

 La construction de l’église actuelle fut terminée en 1759 sur des plans de l’architecte messin Le Brun, validés en 1756, car l’ancienne église était devenue trop petite et trop vétuste.  Le 13 janvier 1760, l’église est bénie  par le curé Thiersant.

La construction de l’église actuelle fut terminée en 1759 sur des plans de l’architecte messin Le Brun, validés en 1756, car l’ancienne église était devenue trop petite et trop vétuste. Le 13 janvier 1760, l’église est bénie par le curé Thiersant.

Un extrait du cadastre de 1812 qui nous montre l’église Saint-Maximim parallèle à la Moselle, le long du quai Crauser

Un extrait du cadastre de 1812 qui nous montre l’église Saint-Maximim parallèle à la Moselle, le long du quai Crauser

Au 18ème siècle :

Donc, nous avons vu qu’avant 1759 existait une autre église, vétuste et trop petite pour la population de la ville. Cette « autre» église se trouvait au même emplacement que l’église actuelle, la ville d’alors enserrée dans ses remparts, n’offrait pas d’autre emplacement pour construire une église plus vaste.

Il a donc fallu détruire [1] l’ancienne église pour reconstruire l’église actuelle. Si une chapelle existait, contigüe à cette ancienne église, donc ultérieure à 1759, elle a du être détruite en même temps. Nous savons par les plans anciens ci-dessous et par quelques documents d’archives que cette ancienne église se trouvait à peu près au même emplacement que l’église actuelle mais qu’elle avait une autre orientation car perpendiculaire à la Moselle et non pas parallèle comme aujourd‘hui.

 


[1]  Le 26 novembre 1755, pendant ce temps les messes se faisaient dans l’église des Capucins

Plan du centre ville de 1749 (Lacheze cote AMT 326Fi19)

Plan du centre ville de 1749 (Lacheze cote AMT 326Fi19)

L’extrait ci-dessous du plan de la ville (ci-dessus), daté de 1749, nous montre qu’effectivement existait approximativement au même endroit qu’aujourd’hui, une église (82) orientée de façon perpendiculaire au rempart (2) et donc à la Moselle qui coule derrière ce rempart.[1]

 


[1] Les fondations de cette ancienne église furent mises à jour lors de la construction de la nouvelle et aussi à la démolition des remparts en 1903.

1482 - Thionville, la chapelle Saint-Michel (suite)

Nous voyons un bâtiment et un seul, accolé à cette église, c’est la chapelle Saint-Michel qu’on appelait aussi la chapelle de l’ossuaire, car il faut savoir que sous cette église, on trouvait le cimetière de la ville, plus tard il y eu aussi un cimetière sur le coté droit de l'église. (Toujours en regardant cers le choeur)

Saint-Michel avec son épée et sa balance

Saint-Michel avec son épée et sa balance

Un mot sur le nom de cette chapelle Saint-Michel ou de l’ossuaire. Pour les chrétiens l'archange Saint-Michel se trouve entre l'homme et Dieu au moment de la mort et pèse les âmes des défunts, il est donc souvent représenté avec une épée et une balance. Nous le retrouvons gravé dans la pierre sur les tympans de certaines églises: Saint-Michel pesant les âmes en regardant droit devant lui sans se laisser distraire par le diable qui tente de faire pencher la balance de son côté. La balance est l'emblème permettant de peser, de mesurer et d'évaluer les actions et les pensées du défunt.

Ainsi, dans l'offertoire de la messe des défunts, Saint-Michel est chargé de prendre soin des âmes de tous les fidèles défunts, en sorte que, lui « le porte étendard céleste », les introduise dans la sainte lumière promise à Abraham et à sa descendance."

De ce fait, il est très souvent associé aux ossuaires dont l’origine remonte aux environs du 10 et 11ème  siècle. Les civilisations de l’antiquité, les romains, procédaient à l’incinération de leurs morts. La religion chrétienne se généralisant avec la croyance en la résurrection de la chair fit que l’inhumation devint la règle.  Au début de la chrétienté, les cimetières sont encore à l’écart du village. Vers le 10ème siècle, on inhume dans l’église même, les personnages important puis par mimétisme, les cimetières s’établissent entoure des églises, chacun voulant reposer au plus près de la maison du Seigneur. L’église et son cimetière deviennent alors une entité sainte à part entière.

Mais voilà, les églises et leur cimetière sont par essence bornés et non extensibles. Alors quand la place manquait [1], on faisait le « ménage » et on entreposait les ossements dans un ossuaire. Dès le 11ème siècle, les premiers ossuaires virent le jour, la place manquait et les animaux qui erraient dans les cimetières alors peu protégés causaient des dégâts aux tombes, les profanant. On installait les ossuaires dans les cimetières, souvent contre le mur de l’église, plutôt vers le chœur. C’étaient de petits bâtiments plus ou moins fermés où l’on entassait les crânes et les os des anciens défunts qui gentiment  faisaient de la place au plus jeunes. Ces ossuaires avaient aussi une valeur pédagogique qui était de signifier aux paroissiens leur condition humaine. Déjà, la cérémonie du mercredi des cendres leur rappelait tous les ans:

«Tu es poussière et tu retourneras en poussière »

Les moeurs évoluant, comme les conditions sanitaires, les cimetières furent interdits autour des églises, au sein des villes et des villages. On mit les cimetières à la « campagne » leur offrant plus de place. Plus besoin de faire régulièrement de la place et les hommes des lumières se croyant plus libres, lassés qu’on leur rappelle leur éphémère condition humaine ne voulurent plus voir ces sinistres ossuaires, aussi vers la fin du 18ème siècle, ils furent abandonnés ou détruits.[2]

Pour Thionville, le cas est un peu particulier, la ville est petite et contrainte dans ses remparts, la place autour de l’église paroissiale qui se trouve au milieu de la ville est comptée, alors on utilisait une crypte sous l’église comme cimetière et l’ossuaire se trouvait alors relégué dans un coin de ladite crypte, en l’occurrence sous la chapelle Saint-Michel.

Ce même procédé a été utilisé lors de la construction de la nouvelle église Saint-Maximim en 1755/1760. Crypte qui existe toujours servant aujourd’hui de débarras où l’on peut encore trouver des vestiges de cet ancien cimetière. [3]

En écrivant cet article, je me suis rendu compte que cette chapelle Saint-Michel et sa situation dans la ville, à côté de l’ancienne église Saint-Maximim, amenait à se poser d’autres questions sur les chapelles internes à l’église, sur les lieux d’inhumations dans la ville. Des recherches plus poussées aux archives de la ville et du département associées à un document rare, ayant appartenu à Charles Abel en 1884, et actuellement dans la collection de Monsieur Dominique Laglasse, archiviste à Thionville, va me permettre de répondre à plusieurs de ces questions et cela viendra compléter ces deux articles sur cette chapelle Saint-Michel.

Dans le prochain article nous verrons donc ce fameux document et nous pourrons sans doute amener quelques clartés sur ces points ignorés de l’histoire de Thionville.
 

 

[1] A Thionville en 1701 on dénombrait environ 150 décès non compris les militaires pour 3 lieux de sépultures dans et hors la ville, sans compter les Augustins.

[2] Voir à ce sujet l’ouvrage de JP Lang « Ossuaires lorrains » 1998.

[3] Voir article dans RPL du 20 octobre 2015 « Le cœur de Reine Petit » jeune femme décédée en 1781.

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