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1676/1750 Thionville-Veymerange : Une famille de maréchaux

Publié le par Persin Michel

Maréchaux ferrants bien entendu !

 

Avant de poursuivre avec deux documents sur la famille Weis de Veymerange, je voudrais rectifier une erreur (faute de frappe) parue dans mon article précédent, Thionville est bien française officiellement depuis 1659 et non pas 1759.

 

Nous avons vu qu’en 1763,  la justice de Veymerange était sous l’autorité du maire, Damien Weis, alors maréchal ferrant du village. Métier exercé dans la suite de son père Mathis Weis, dont il avait « hérité » la forge.

 

Les deux documents qui suivent nous donnent quelques éléments supplémentaires sur cette famille.

 

Premier document  daté du 11 décembre 1676

 

(Acte notarié passé devant le notaire thionvillois Helminger ADM 3E7530)

 

« Par devant les notaires royaux établis à Thionville et y résidants, soussignés, furent présent en leur personnes, les dames abbesses et religieuses du monastère de Sainte-Catherine, ordre de Sainte-Claire, en cette ville de Thionville, lesquelles de leur bon gré, nous ont dit et déclarés avoir loué et laissé à titre de bail, pour terme de six années consécutives et s’en suivant, sans intervalles qui commencent à la Saint-Georges dernière et finiront à pareil jour, à Mathis Blanc (Weis) , demeurant à Veymerange, maître maréchal ferrant de sa profession, présent et acceptant, les biens immeubles provenant de Yvon Grein, alias « Petit », obtenus par sa veuve en qualité de pensionnaire perpétuelle de notre couvent.

Biens situés au ban de Volkrange et environs, constitués de terres arables et non arables et prairies. Conformément aux instructions que lesdites dames abbesses et religieuses donneront au preneur (Mathis Blanc » celui-ci sera tenu de livrer chaque année à ses frais à Thionville, six bichets de bon moitange (mélange de grains) et quatre livres et dix sols tournois monnaie de France payables à la Saint-Martin de chaque année.

 

A l’expiration dudit bail, ledit preneur devra rendre les biens en bon et suffisant état. Ledit preneur oblige tous ses biens présents et à venir envers les dames religieuses, s’il ne remplit pas ses obligations.

 

Passé à Thionville  le douzième de décembre 1676, nous (les notaires) et les dames abbesses et religieuses avons signé, Mathis Blanc n’ayant l’usage d’écrire, a fait sa marque

Signatures au bas de ce premier document

Signatures au bas de ce premier document

Remarques sur le document :

 

 On voit que le monastère en question est dénommé monastère de Sainte-Catherine, ordre de Sainte-Claire, situé à Thionville. Ce monastère, je dirais plutôt couvent, correspond au couvent, des clarisses urbanistes [1], dit du Saint-Esprit qui s’était établi à Thionville dans les années 1630. Le bâtiment abritant ce couvent est aujourd’hui l’hôtel de ville de Thionville. [2]

 

Pour appuyer ma remarque [3] sur la francisation des noms propres dans la suite de « l’annexion de fait » par la France en 1643, on voit que Mathis Weis est appelé Mathis Blanc. Cette pratique fut courante à l’époque, par la suite, pour la plupart, les noms d’origine, furent de nouveau utilisés.

 

On voit aussi que les terres mises à bail et situées à Volkrange, appartenait auparavant à un certain Yvon Grein [4] dit « Petit » et que c’est sa veuve qui avait donné ses terres au couvent de Sainte-Catherine de Thionville, en dédommagement,  le couvent ayant pris ladite veuve, en pension jusqu’à sa mort.

Principalement dans les premières années d’établissement d’un couvent ou d’un monastère, c’était une pratique courante, de subvenir à leur fonctionnement, par  ce genre d’arrangement.

 

Nous voyons que dans les signatures, seules l’abbesse et une sœur ont signé :

 

Sœur Marie de Beurthé, indigne Abbesse

 

Sœur Anne Françoise Baur

 

Le qualificatif « Indigne » est réservé à l’abbesse, les sœurs en général font suivre leur nom du qualificatif de « Discrète ».

 

La famille de Beurthé a donné plusieurs abbesses à ce couvent, toutes, au moins dans les premières années, venaient de familles nobles ou pour le moins de notables.

 

La sœur Anne Françoise Baur était la directrice des novices, c’est elle qui prenait en charge les « nouvelles recrues ».

 

Mathis Blanc ne sachant signer, une croix marque son accord et nous trouvons aussi les signatures des notaires thionvillois, Helminger et  Fourot.

 


[1] Les clarisses urbanistes suivaient une règle moins stricte que les pauvres dames, elles avaient le droit de posséder des biens mobiliers et immobiliers.

[2] J’ai entrepris depuis quelques mois des recherches sur l’établissement de ce couvent à Thionville. Ces recherches feront l’objet d’un ouvrage qui devrait paraître en 2018

[3] Voir l’article précédent

[4] Sans doute « Klein »

Deuxième document  daté du 9 février 1750 :

 

(Acte notarié passé devant le notaire thionvillois Probst  ADM 3E7687)

 

«Par devant nous notaires royaux établis à Thionville et y résidant, soussigné, fut paru Mathis Veisse, maréchal ferrant demeurant à Veymerange, lequel a déclaré avoir vendu, cédé, dès maintenant en toute propriété à Damien Veisse, son fils, aussi maréchal ferrant demeurant au même lieu, les outils que le vendeur a en sa possession et servant à son métier de maréchal ferrant, consistant notamment en un soufflet de forge, une enclume, un étau et les marteaux et autres outils de ladite forge avec le charbon qui se trouve dans la forge audit Veymerange, sans en rien réserver.

La présente vente faite pour et moyennant le prix et somme principale de 150 livres tournois sans y comprendre les frais.

 

Laquelle somme de 150 livres tournois, ledit Veisse père, vendeur, a reconnu avoir reçu dudit Damien Veisse, à son contentement et quittance.

 

Ledit Damien Veisse pourra jouir de tous les outils nécessaires au métier de maréchal ferrant en y comprenant la pierre meule à aiguiser les outils.

 

Ledit vendeur engage ses biens présents et à venir, passé à Thionville le 9 février 1750, la lecture et les explications faites en langue germanique, nous avons signé avec Damien Veisse et Mathis Veisse n’ayant l’usage d’écrire a fait sa marque. »

Signatures au bas du deuxième document

Signatures au bas du deuxième document

Remarques sur le document :

 

En premier lieu nous constatons qu’en 1676, nous voyons le nom de famille « Blanc » soit le nom d’origine « Weiss »  francisé (traduit) et qu’en 1750, nous sommes revenu au nom d’origine même si le notaire l’orthographie à la française soit « Veisse ».

Mais on constatera sur les signatures que Damien signe « Weis » et que son père fait une marque « MW »  pour Mathis Weis.

Il est intéressant que voir qu’un certain Jean Blanche, propriétaire de la poste aux chevaux de Hayange en 1690, passe un acte de vente avec le meunier de Marspich, Didier Scholler dont l’épouse est Anne Marie Blanche et de constater qu’il signe de son vrai nom  « Weis ». Il est probable que cette famille « Blanche » de Hayange/Marspich soit apparentée à celle des maréchaux ferrants de Veymerange.

Jean Blanche, signe Joannes Weiss

Jean Blanche, signe Joannes Weiss

Toujours au sujet des signatures, on remarquera qu’en 1676, Mathis Blanc donc Weis fait une croix et qu’en 1750, Mathis Weis signe de ses initiales. C’est tout simplement que ce ne sont pas les mêmes personnes car il est impossible que Mathis Weis, père de Damien Weis, signe un document en 1750 et qu’il signe un bail en 1676, soit 74 ans auparavant ! En fait, Mathis Blanc (Weis) qui signe le bail de 1676 était le grand-père de Damien Weis.

 

Mathis Blanc (Weis) le grand père de Damien:

 

Il était né à Veymerange en 1647 et décédé à Veymerange un peu après 1701, il exerçait le métier de maréchal ferrant. Marié à Marie Limbourg de Volkrange, il eut plusieurs enfants dont Mathis Weis.

 

Mathis Weis le père de Damien :

 

Né à Veymerange et décédé le 3 novembre 1755 à Veymerange, lui aussi maréchal ferrant. Marié le 23 février 1701 à Veymerange avec Suzanne Schweitzer, ils eurent plusieurs enfants dont Damien Weis.

Damien Weis :

 

Né à Veymerange, le 15 janvier 1716, décédé à Veymerange, le 18 février 1780, maréchal ferrant, comme son père et son grand père.

Marié une première fois avec Catherine Bonaventure le 7 janvier 1744, puis une seconde  fois le 10 janvier 1769 avec Madeleine Scheiltien. Ils eurent également plusieurs enfants.

 

Nous avons affaire à une lignée de maréchaux comme c’était souvent le cas dans cette profession qui exigeait d’avoir suivi un apprentissage qui se faisait alors au sein de la famille. C’était souvent le cas dans les familles de meuniers.

 

La forge de Veymerange se trouvait à cette époque dans une maison aujourd’hui disparue qui se trouvait dans le bas du village, vers la ferme « Foetz ». Plus tard, au 19ème  et début du 20ème siècle, elle sera installée dans une autre maison. (voir le plan cadastral de 1807)

Plan cadastral de 1807 (Napoléon)

Plan cadastral de 1807 (Napoléon)

Détail du plan cadastral montrant les différents emplacements de la forge

Détail du plan cadastral montrant les différents emplacements de la forge

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