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1704 - Un duel à Thionville et le bourreau de la ville.

Publié le par Persin Michel

1704 - Un duel à Thionville et le bourreau de la ville.

 

Le 24 août 1704 eut lieu un procés extraordinaire fait par le lieutenant criminel au bailliage de Thionville à la requête du substitut du procureur général du roi au même siège à l’encontre de Jean Krieger, curateur établi au corps mort [1] du nommé « Aubry » qui vivant était sergent à la compagnie du sieur Brouk au régiment de pied [2] espagnol tenant garnison actuellement à Thionville.

 

Son corps fut déposé à la conciergerie du siège et il est accusé (le cadavre) de s’être battu en duel avec le nommé « Jollicoeur » aussi sergent dans la même compagnie.

 

Le curateur du corps mort du nommé « Aubry » fait appel au parlement de Metz, de la sentence rendue au bailliage de Thionville le 20 août 1704.

 

Cette sentence a établi et déclaré que le sieur « Aubry » a été suffisamment atteint et convaincu de s’être battu en duel et pour ce faire de s’être transporté, le 18 août 1074 à 6 heures du matin, avec le sieur « Jollicoeur » sergent dans la compagnie de Brouck, dans le bois d’Illange, éloigné de trois quarts de lieue de Thionville. Dans le duel il aurait été blessé d’un coup d’épée dont il serait mort.

 

Pour réparation, la sentence du bailliage a ordonné que le cadavre du sieur « Aubry » serait mis dans les mains de l’exécuteur de la haute justice [3] pour être trainé sur la claye la face contre terre [4] en lieux ordinaires et accoutumés de Thionville, puis pendu par les pieds à la potence qui est située sur la place d’armes de la ville et y demeurer pendant deux heures et ensuite attaché à un arbre, dans le bois d’Illange, sur le grand chemin de Metz. Ses biens acquis et confisqués au profit de sa majesté.

 

A l’égard du sieur « Jollicoeur », il est ordonné qu’il sera fait perquisition [5] de sa personne pour être pris et appréhendé au corps et conduit dans la prison du bailliage et son procès extraordinaire fait et parfait, sinon par contumace.

 

Dominique « Ninoy » procurateur à la cour établi par elle comme curateur du cadavre du sieur « Jollicoeur » [6] a été entendu en la chambre du conseil et le bureau a tout considéré. La cour dit qu’il a été bien jugé et sans grief.

 

Signé, le 20 août 1704, au parlement de Metz.

 

NB: Les noms propres ne sont absolument pas fixés à cette époque et peuvent varier au sein d'un même document.

 


[1] Avocat nommé pour la défense du cadavre.

[2] Probablement des dragons.

[3] A cette date, l’exécuteur des hautes et basses œuvres, c’est à dire le bourreau de la ville, est Jean Pierre Dalenbourg, son fils reprendra la charge à sa suite.

[4] Suivante l’ordonnance de 1670, les suicidés ou personnes s’étant défaites eux-même, devaient être traînées par la ville, sur un brancard de bois (la claye ou claie). Le duel rentrait dans ce cadre.

[5] Il sera recherché.

[6] Le duel était en général puni de mort.

Dessin au trait d'un supplicié tiré sur la claie.

Dessin au trait d'un supplicié tiré sur la claie.

Thionville en 1750 - La place d'armes  est au centre des N° 60 - 61 -62

Thionville en 1750 - La place d'armes est au centre des N° 60 - 61 -62

Le bourreau de Thionville

 

Dans le document relatant le duel de 1704, on fait référence au maître des hautes et basses œuvres [1] de Thionville, c’est à dire au bourreau [2] de la ville, chargé d’exécuter les sentences du bailliage.

Un document du 8 juin 1748, nous donne quelles indications sur cette charge de bourreau à Thionville, en voici l’essentiel :

« Nous lieutenant général, conseillers et gens du bailliage et siège royal de Thionville, au vu des lettres patentes de provisions obtenues de sa majesté par Jean Dalembourg, fils du défunt, Jean Pierre Dalembourg, vivant, maître des hautes et basses œuvres de la ville de Thionville, exécuteur des jugements et sentences criminels, des hautes et basses œuvres de Thionville, faubourgs et villages du ressort du bailliage que tenait et exerçait le défunt Jean Pierre Dalembourg, son père, pour en jouir conformément aux lettres patentes datées de Paris du 11 avril 1748 et signées par le Roi.

Les dites lettres à nous adressées et scellées du grand de cire jaune pendant au parchemin, la requête présentée par le sieur Jean Dalembourg, aux fins qu’ils nous plaisent de le recevoir à l’office d’exécuteur des jugements, sentences criminels des hautes et basses œuvres de Thionville, faubourgs et villages du bailliage.

L’assemblée du bailliage a été informée de la vie et mœurs du sieur Jean Dalembourg, de sa religion, naissance et de son affection au service du Roi, cette information faite et communiquée au procureur du Roi. Tout considéré, nous ordonnons que le sieur Jean Dalembourg sera reçu à l’office d’exécuteur des jugements et sentences criminels des hautes et basses œuvres de la ville, des faubourgs et villages en ressortant.

A lui d’en jouir conformément aux lettres de provisions,  et de prêter le serment requis dans ce cas.

Fait et délibéré à Thionville en la chambre du conseil le 8 juin 1748.

 

Signé : FringanLarminat et 2 autres signatures illisibles.

 

A l’instant le sieur Jean Dalembourg, présent à l’audience à prêté le serment ordonné par notre présente sentence d’être fidèle au Roi et de bien fidèlement exécuter son office.

 

Signé : Jean Dalembourg

 

Référence archives: ADM B4277

 


[1] Les hautes œuvres consistaient à l’exécuter les sentences de mort, le marquage aux fer rouge, la mise au carcan… Les basses œuvres étaient  moins « valorisantes », c’était l’équarrissage, le nettoyage, l’abattage d’animaux errants…

[2] Le bourreau était plutôt craint et méprisé par les habitants, si dans d’autres villes, il habitait en dehors des murs, à Thionville son logement se situait vers la porte de Luxembourg, en la rue de la vieille porte appelée au moyen-âge, la rue de la culbute !

 

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