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thionville 18eme siecle

1755 – Construction de la nouvelle église Saint-Maximin (3ème et dernière partie)

Publié le par Persin Michel

Nous sommes en juin 1755 et déjà cinq plans ont été établis :

  • Morant
  • Nollet
  • Régemorte
  • Louis
  • Loriot

Le 10 juin 1755, les officiers de l’hôtel de ville se réunissent avec les députés du bailliage et les notables pour faire un point de la situation comme suit :

« Le 12 octobre 1754, il a été procédé à l’adjudication de la construction de la nouvelle église sur un plan dressé à la hâte par le sieur Nollet sur instructions du maréchal de Belle-Isle et de l’abbé de Saint-Maximin. C’est sur ce plan que l’abbé s’est rendu adjudicataire des ouvrages qui le concernent pour une somme de 55000 livres tournois.

Depuis, il a été remarqué des défauts frappants sur ce plan Nollet par tous les connaisseurs et par le maréchal qui a souhaité qu’il en fut dressé un autre par le sieur Louis, architecte à Metz avec un devis estimatif. Ce plan du sieur Louis a été trouvé par tous, bien supérieur au plan de monsieur Nollet. En conséquence, nous avons demandé à l’intendant de Metz d’envoyer à Trêves, deux députés de la ville pour demander à l’abbé de prendre en charge l’excédent de dépenses qu’exige le nouveau plan du sieur Louis.

L’abbé, bien qu’il convienne que le nouveau plan est supérieur à l’ancien  ne veut pas déroger à son engagement pour le premier plan du sieur Nollet. L’intendant et le maréchal ont été informés de ce fait, mais l’abbé, précédant toutes les instances, a traité avec des entrepreneurs de Metz, pour exécuter le plan de Nollet.

La ville a donc résolu de présenter les deux plans à l’intendant de Metz pour le supplier d’agréer le plan du sieur Louis et d’autoriser à faire la dépense qui la concerne par une adjudication au moins disant.

D’autre part, la ville est résolue à faire un caveau sous toute l’étendue de l’église projetée pour les inhumations dont la dépense serait de 6941 livres tournois, cela car le cimetière qui régnera autour de l’église n’étant de chaque côté d’environ 15 pieds, il se trouverait insuffisant pour l’inhumation des habitants.

La ville a aussi contacté les bénéficiaires des chapelles qu’il faudra reconstruire pour voir s’ils seraient disposés à prendre à leur charge ce coût, mais ils ne semble nullement disposés à le faire. »

Dans le même temps la ville envoi ce rapport au maréchal de Belle-Isle, elle en profite pour se justifier des retards et de la non mise à disposition des terrains aux entrepreneurs en attendant le choix définitif d’un plan, sachant que les fondations sont différentes. Elle dit que dorénavant elle se résignera à mettre en adéquation l’ouvrage projeté avec ses finances, mais que le coût des dépassements sera supérieur à 20000 livres tournois. Elle remercie encore le maréchal de tout le temps qu’il consacre à cette affaire.

 

L’adjudication de la démolition des maisons la Roche et Limbourg a été faite, la maison la Roche a été achetée, celle du sieur Henri Limbourg [1] également pour une somme de 8698 livres tournois fixée [2] par l’intendant de Metz, monsieur Jean Louis François de Caumartin,  et non 12000 livres tournois comme le réclamait le sieur Limbourg. Le sieur Limbourg sera libre de récupérer l’ensemble des taques de cheminées de sa maison.

En plus des maisons La roche et Limbourg, il est prévu d’acheter le jardin de Robert Latouche et Agnés Collin son épouse, le jardin est estimé par les experts Jean Louis et Jean Cosse à la somme de 6650 livres tournois, il faudra aussi détruire la gloriette de ce jardin avec son toit en ardoise dont la démolition par le sieur Blanmangin coûtera 53 livres tournois.

Les terres enlevées pour confectionner les fondations seront amenées sur la partie du rempart qui doit être élargie et le reste des terres ira combler des trous derrière l’hôpital militaire.

Le problème du plan définitif devient crucial car les entrepreneurs ont commencé à creuser les fondations d’après le plan du sieur Nollet, comme voulu par l’abbé de Saint-Maximin, les autres plans ont des fondations différentes, aussi il est urgent de se fixer définitivement sur un plan unique et cela va encore nécessiter de nombreux courriers entre la ville, l’abbé et le maréchal de Belle-Isle.

Le 30 juin 1755, le maréchal écrit aux officiers de la municipalité de Thionville pour leur dire qu’en juillet, il viendra sur la frontière et qu’à cette occasion, il verra l’abbé pour essayer de le convaincre et faire évoluer les choses dans le sens de la ville.

Le 23 août 1755, les entrepreneurs ont commencé l’excavation des terres pour les fondations depuis un mois, or rien n’est réglé au niveau du plan définitif. Le maire, Wolkringer et le syndic Petit vont aller à Metz pour obtenir une décision, mais bien qu’ils y soient restés jusqu’au 28 août, ils reviendront sans décision positive, l’abbé restant sur ses positions.

En septembre, on va nommer Pierre Conrard, maître maçon de Thionville pour surveiller les travaux, la composition de la chaux et le fait qu’on n’utilise pas les pierres de démolition des maisons qui sont de mauvaise qualité, ni de pierres bleues, pour ce travail, il sera payé 30 livres tournois par mois.

Le 29 septembre, il semble que l’on ait encore modifié l’emplacement du clocher qui devait être monté au-dessus du portail de la nouvelle église et que l’on veut maintenant mettre à l’autre bout au-dessus du chœur, ce qui obligerait la ville à racheter le jardin de monsieur Soucelier, avocat au bailliage pour une somme de 4530 livres tournois.

Le 9 novembre 1755, le sieur Meaux, entrepreneur avertit qu’il allait commencer la démolition de l’ancienne église et récupérer les matériaux qui sont estimés à plus de 5000 livres, la ville s’oppose à cette décision et demande qu’un plan unique de la nouvelle église soit enfin accrédité et estimé et que l’adjudicataire récupère les matériaux de l’ancienne église.

 

[1] Conseiller du roi et procureur à la maitrise des eaux et forêts

[2] Expertise faite par Jean Louis architecte à Metz et par Pierre Conrard, maître maçon de Thionville

 

Comme on le voit, les problèmes s’ajoutent les uns aux autres et en la matière, la ville n’a pratiquement aucun pouvoir de décision, ni les financements nécessaires.

Elle veut absolument un nouveau plan plus conforme à ses attentes, l’intendant et le maréchal de Belle-Isle, la soutiennent et lui ont demandé de contacter le sieur Jean Gauthier, ingénieur du roi de Pologne, duc de Lorraine, pour avoir un nouveau plan, celui-ci très pris ne répond pas à la ville mais à priori, il s’est rapproché du maréchal de Belle-Isle.

Le 17 novembre, on va déménager l’orgue de l’ancienne église au couvent des capucins puisque c’est là que se font provisoirement les services religieux, de même les cloches vont être descendues de la tour et entreposées, pour la démolition du clocher, l’intendant pense qu’il faille le démolir à moitié pour éviter qu’il ne s’écroule tout seul quand l’église sera démolie.

Enfin le 13 mars 1756, la ville reçoit un courrier du maréchal de Belle-Isle qui annonce avoir vu les plans du sieur Gauthier et que la ville va les voir prochainement. Mais voilà, aucun accord ne sera encore trouvé car le clocher au-dessus du chœur oblige à acheter le jardin du sieur Soucelier et éloigne les cloches de la ville, certains pensent que le clocher devrait être au-dessus du portail d’entrée ce qui revient moins cher et rapproche les cloches de la ville, d’autres encore veulent un clocher terrasse mais la ville préfère un clocher pointu en ardoises. Bref, rien n’avance et le sieur Gauthier est fort pris par ses affaires à Nancy et n’a guère de temps à modifier ses plans dans le sens de la ville, appel est donc lancé au maréchal de Belle-Isle.

Le 15 août 1756, le maréchal écrit depuis Compiègne, à la ville de Thionville, qu’il a vu le sieur Gauthier avec le sieur Trouville [1] et le sieur Le Brun [2], professeur de mathématiques à Metz, pour faire avancer le projet. A Thionville, les travaux avancent sans plan dûment validé et sur la base du plan du sieur Nollet, les fondations sont faites, les caveaux sont terminés et les murs du contour sont avancés à 5 ou 6 pieds de hauteur, sauf le mur de devant, le plan du sieur Gauthier remanié n’est toujours pas disponible.

Le 13 avril 1757, les choses semblent avoir progressées, car le sieur le Brun qui ne devait faire qu’une estimation du nouveau plan de l’architecte Gauthier, a repris le plan et propose remplacer le clocher en charpente et ardoises initial par deux tours en maçonnerie au-dessus du portail et par la même d’abaisser la hauteur de l’église de 6 pieds, modifications qui abaissent le coût de l’église.

Le 26 mars 1757, monsieur de Bernage de Vaux écrit au sieur Wolkringer, maire de Thionville qu’il a vu les plans et devis repris de l’architecte Gauthier par le sieur le Brun de Metz et que cela lui semble maintenant prêt à être exécuter, il veut donc les voir rapidement à Metz, le maire et le syndic, monsieur Petit. L’entrevue a lieu le lendemain avec le sieur le Brun qui a donné toutes les explications utiles, puis ils ont vu l’intendant et parlé des difficultés qu’ils ont avec les entrepreneurs, Meaux et Geisler.

 


[1] Trouville Jean Roch, conseiller du roi, contrôleur général des domaines du roi à Metz et avocat au parlement. Secrétaire en chef de l’intendance, puis commissaire des guerres, seigneur de Ban-saint-Pierre, Clouange et autres lieux, décédé en 1758 à 59 ans, il avait épousé Madeleine Wolkringer, fille du maire perpétuel et lieutenant de police de Thionville.

[2] Louis Gardeur-Lebrun appelé simplement le Brun : Voir la notice en fin d’article.

 

Plan "le Brun" avec les escaliers montant aux deux tours et emplacement des chapelles.

Plan "le Brun" avec les escaliers montant aux deux tours et emplacement des chapelles.

Le 13 avril 1757, l’assemblée des officiers de l’hôtel de ville se réunit avec les députés du bailliage, les notables, monsieur le baron de Hain, monsieur Patiot alors trésorier, monsieur Potot receveur des finances, le sieur Creite ancien lieutenant général du bailliage, le sieur Gand contrôleur des finances, messieurs Barthel et Soucelier avocats au parlement, monsieur Breistroff, conseiller lieutenant général de police et monsieur Pierre Deschamps maître particulier de la maîtrise des eaux et forêts.

Après avoir vu les plans, le devis et tous les problèmes annexes et entendu l’ensemble des avis, la chambre de Thionville a adopté le plan revu par le sieur le Brun qui avec ses deux tours terrasses maçonnées leur paraît d’un aspect agréable. Toutefois, à l’égard de l’augmentation des prix demandée par les entrepreneurs, la chambre la récuse vu qu’ils ont profité des démolitions, celle du clocher de l’ancienne église, de la sacristie, des cinq chapelles dont quatre voûtées construites en pierre de taille et des murs et des voûtes des caves des maisons démolies. Aussi, la ville demande à monsieur l’intendant de débouter les entrepreneurs de cette demande d’augmentation.

Le 11 décembre 1757,  monsieur de Bernage [1] consent à ce que la ville qui lors de la publication de renouvellement du fermage des octrois, n’avait reçu aucune offre puisse ne les adjuger que pour un an et ainsi pouvoir avoir de meilleurs prix les années suivantes quand les circonstances de la guerre [2] et le défaut de garnison en ville seront passés.

Enfin la construction de l’église reprend et se poursuit pendant l’année 1758 et 1959 la coupole sera peinte le 30 mai 1759, par Charles Collignon, peintre de Thionville qui sera payé pour se faire 1200 livres. Enfin, le 3 novembre 1759, un courrier part vers le maréchal de Belle-Isle lui signalant que l’église de Thionville est achevée et que l’abbé de Saint-Maximin de Trêves voudrait venir dire la première messe, le maréchal en fait part à l’évêque de Metz en lui demandant son avis  mais en  l’incitant à accepter ce qui pourrait pousser l’abbé à peut être plus de générosité  sur  sa participation financière.

Toutefois, un courrier du 29  décembre 1759, arrive à la cure de Thionville en provenance de l’abbé de Saint-Maximin de Trêves. Il explique que malheureusement, il ne pourra se déplacer à Thionville pour l’inauguration car il est trop occupé à ses affaires et loin de son monastère. Il invite donc l’évêque de Metz à nommer qui il veut pour participer à cette consécration mais que peut-être au printemps, il pourra venir à Thionville pour une cérémonie.

Le 3 décembre 1759, l’évêque de Metz demande à l’archiprêtre et curé de Florange de faire une visite de la nouvelle église et de lui faire un rapport sur son état, pour voir si tout est en ordre. Ce rapport sera fait le 3 janvier 1760 et conclura à un bon état de la nouvelle église mais contestera l’emplacement des fonds baptismaux et diverses petites choses, mais dans l’ensemble l’église peut être consacrée ce qui sera fait courant 1760.

Le maréchal de Belle-Isle décèdera peu de temps après l’inauguration de l’église soit le 22 janvier 1761 à Versailles.

 


[1] D’une grande famille de conseillers d’état, maître des prévôts de Paris. Bernage de Vaux fut intendant, c’est lui qui fit venir Louis Gardeur-Lebrun à la sous-direction des travaux et communications à Metz.

[2] Guerre de 7 ans (1756 à 1763) qui fut pratiquement une des premières guerres mondiales tant les nations et les pays impliqués furent nombreux et qui vida en partie Thionville de ses troupes et des ses revenus.

 

Voilà notre nouvelle église Saint-Maximin construite et consacrée, mais voyez vous les ennuis ne sont pas terminés pour la ville car le 25 février 1762, les entrepreneurs ayant construit l’église vont écrire à l’abbé pour lui dire que leur dépense a été bien plus forte que prévue, celui-ci leur propose 100 louis de plus, qu’ils refusent, se réservant d’aller en justice, après avoir refait de nouveaux toisés des ouvrages.

Le sieur Nollet réclame le 8 novembre 1762, 226 livres qui lui seront payées, pour des mesures faites par lui pendant les travaux.

Le 12 novembre 1762, la ville apprend la mort de l’abbé de Saint-Maximin, ce qui ne va rien arranger. Les entrepreneurs, au vu des nouveaux toisés, vont porter l’affaire en justice et le 5 janvier 1767, la ville de Thionville sera condamnée, par un arrêt du conseil d’Etat à payer plus de 55000 livres de supplément, ce qui l’obligera à refaire un emprunt et à taxer plus fortement, les plus imposables de ses habitants, dans lesquels on trouve principalement des marchands, un cabaretier, un tanneur, le directeur de la poste aux lettres, un apothicaire et un chirurgien, une rentière et un député.

De nombreux plans successifs furent établis avec des variantes et des devis estimatifs, soit un travail important qui sera finalisé par le sieur le Brun, professeur de mathématiques à Metz, qui aura l’idée des deux tours clochers en terrasse,  variante qui amènera une économie certaine ce qui avec la lassitude de toutes les parties, amènera à la réalisation concrète de l’église.

 

Ici, se termine le récit un peu long et technique de la construction de la nouvelle église Saint-Maximin qui nous montre un investissement important de la ville, de ses habitants et de ses officiers municipaux tant au niveau de leur implication personnelle, principalement à ne pas lâcher sur la qualité architecturale qu’il voulait pour la nouvelle église de leur ville et cela malgré les difficultés financières, et alors qu’ils ont, en fait, si peu de pouvoir de décision. Pouvoirs qui sont eux, aux mains de l’intendant et du maréchal de Belle-Isle, dont il faut ici se souvenir, de son implication et de son suivi bienveillant à l’égard de la ville.

Louis le Brun :

Exactement, Louis Gardeur-Lebrun né le 18 septembre 1714 à Metz, son père Sébastien était charpentier puis entrepreneur. Louis le Brun s’engagea très jeune dans le régiment Dauphin Dragons puis fut nommé ingénieur géographe.

Ensuite, il ouvrit à Metz une école de mathématiques où étudièrent aussi deux de ses frères. En 1752, il est nommé ingénieur de la ville de Metz puis, il enseignera les mathématiques à l’école royale d’artillerie. Monsieur de Bernage de Vaux, intendant, le fera nommer en 1756 à la sous-direction des travaux et des communications où il fut l’adjoint de Jean Gauthier, architecte du roi de Pologne. Après le décès du maréchal de Belle-Isle, il dirigera le service des travaux et communications.

Il arrêta ses cours de professeur de mathématiques en 1781 et décéda le 19 février 1786 à Metz où il fut inhumé.

NB : Cette courte notice montre bien que Louis Gardeur – Lebrun, dit le Brun, avait des relations étroites avec monsieur de Bernage de Vaux, le maréchal de Belle-Isle et Jean Gauthier, architecte du roi de Pologne, tous impliqués fortement dans la construction de la nouvelle église Saint-Maximin de Thionville.

 

1903 - L'église lors de la démolition des remparts

1903 - L'église lors de la démolition des remparts

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1737-1760 THIONVILLE Construction de l'église Saint-Maximim (1ère partie)

Publié le par Persin Michel

Nous avons vu dans l’article précédent l’ancienne église Saint-Maximim et la chapelle Saint-Michel dite de l’ossuaire, accolée à cette église. Cette église s’était dégradée et ne pouvait plus contenir l’ensemble des paroissiens de la ville y compris la garnison.

La ville rachètera en 1755, les maisons des sieurs de La Roche, Limbourg et le jardin du sieur de Latouche [1] .  Toutefois, avant d’en arriver à l’achat de ces maisons, et à la construction de la nouvelle église Saint-Maximim, il y eut tout un processus que je vais dérouler ci-dessous :

Toutes les visites pastorales [2] de l’ancienne église de Thionville pointent l’impossibilité d’accueillir l’ensemble des paroissiens à cause de la petitesse de l’église et toutes signalent également un ensemble de problèmes liés à sa vétusté. Tout le monde s’accorde donc sur la nécessité d’agrandir cette église.

De plus, nous sommes encore assez proches de la cession de la ville à la France [3] et l’administration civile et religieuse n’est pas encore finalisée. Ainsi en 1733, on interdira trois confréries de Thionville, Saint-Sébastien, Saint-Roch et Saint-Antoine car les habitants se pressent aux cérémonies de ces confréries, se forment en défilés armés et parcourent la ville, perturbant  le calme de la cité.

 

[1] Marie Madeleine le Brun veuve de Jean François de la Roche Girault , écuyer et seigneur de Bétange, ancien capitaine d’infanterie. Jacques François de la Roche Girault, écuyer et seigneur de Bétange, commissaire d’artillerie à Thionville et enfin Suzanne de la Roche Girault.

Le sieur Limbourg était procureur du roi en la maitrise des eaux et forets.

Le sieur de Latouche était conseiller du roi au bailliage.

[2] De 1721 à 1751

[3] Prise en 1643, cédée en 1659

 

Toujours en 1733, la paroisse de Thionville se verra dorénavant imposer des religieux et curés d’origine française et l’abbé de l’abbaye de Saint-Maximim de Trêves,

qui nommait les prêtres et curés de Thionville, car il était le collateur et décimateur de la paroisse, se voit contester dans ses choix.

 

L'abbaye Saint-Maximim de Trêves au 17ème siècle (Internet)

L'abbaye Saint-Maximim de Trêves au 17ème siècle (Internet)

Malgré cela l’affaire de l’agrandissement de l’église se précise, le sieur de Creil qui est l’intendant et commissaire de la généralité de Metz depuis 1723, écrit le 3 avril 1737 à son subdélégué de Thionville la lettre suivante :

« J’ai bien reçu votre courrier du 28 mars avec les plans que je vous avez demandés concernant l’église, j’en ai conféré avec monsieur Thiersant, curé de Thionville.

Il faudra s’en tenir pour l’agrandissement à la maison de monsieur de la Roche, ce parti convient mieux que l’autre, mais il y a un préliminaire indispensable à observer avant toutes autres choses, c’est qu’il faut avoir le consentement par écrit des abbés et religieux (de Saint-Maximim de Trêves) pour la dépense de la réédification et agrandissement de l’église qui les regarde ou une condamnation qui les y oblige et pour cela il faut commencer par une sommation judiciaire de la part des différents ordres et paroissiens de Thionville, à moins que vous ne preniez le parti, attendu que vous connaissez ces religieux, de leur écrire pour savoir leur résolution là-dessus, peut-être se détermineront-ils volontairement à se porter à cette dépense, sinon on suivra l’autre voie.

Nous verrons ensuite à prendre les moyens les plus convenables pour la dépense qui regardera les paroissiens de Thionville.

Je vous prie de faire part de ce que je vous marque, aux officiers de l’hôtel de ville. »

Les officiers de l’hôtel de ville prévenus, se réunissent le 8 avril 1737, avec les membres du bailliage, le curé Thiersant, les notables et les maîtres de tous les corps.

L’assemblée constituée va proposer deux projets :

1er projet :

« Acheter la maison de monsieur de la Roche qui l’a acquise lui-même en 1733 de la succession des héritiers « Hugony » pour y faire construire par l’abbaye de Saint-Maximim de Trêves, une nouvelle église dont l’entrée sera du coté du nord vers la maison du sieur Petit et dont on fournira le plan. »

2ème projet :

« Au cas ou le sieur de la Roche ne voudrait pas vendre sa maison, on agrandira l’église du côté du couchant, on y comprendra la maison d’école qui appartient à la ville et celle de la demoiselle Barthel, de monsieur Probst et consorts, dont on fera l’acquisition.

Si cela ne suffit point, on fera du côté du midi un collatéral qui comprendra le cimetière en son entier et un autre du côté du bord dans l’endroit où sont les trois chapelles de telle largeur qu’on pourra prendre. L’ancien clocher subsistera dans l’état où il se trouve, pour pouvoir faire le tour de l’église, on rétablira l’escalier ou la pente qui est à côté de la sacristie comme elle était d’ancienneté. 

Le tout approuvé, chaque corps en particulier et tous en général, ayant même promis pour ferme et stable ce que sera fait pour l’exécution de l’un ou l’autre des projets, il ne sera pas demandé d’octroi.[1]

Pour parvenir au paiement chacun y contribuera après y avoir employé les revenus et biens de la ville disponibles et particulièrement les coupes de bois. »

 

[1] La ville n’augmentera pas les tarifs des octrois situés aux portes de la ville

Voir la situation des maisons sur ce plan de 1750 (Collection Dominique Laglasse)

Voir la situation des maisons sur ce plan de 1750 (Collection Dominique Laglasse)

Le 4 mai 1737, l’intendant [1] à qui ont été envoyé les résultats, par le curé Thiersant, a autorisé le projet.

Les religieux et abbés de Saint-Maximim de Trêves ont été invités sous plusieurs formes et depuis le 25 février 1735 à faire l’agrandissement de l’église de Thionville, mais ils ne donnent pas suite, faisant la sourde oreille.

L’assemblée de l’hôtel de ville de Thionville réunie le 4 mais 1737, notifie qu’elle serait en droit de se pourvoir en justice ordinaire pour les y faire condamner, cependant comme on ne peut trop mettre en usage les voies de la douceur, il a été résolu que le sieur Gand, conseiller échevin, se transportera à Trêves avec le curé Thiersant pour communiquer les résultats et intentions de l’assemblée, pour les porter à s’exécuter, les paroissiens s’offrant de fournir le terrain convenable pour l’église nouvelle.

Au cas, où contre tout espoir, les religieux de Trêves refuseraient de rendre une réponse favorable par écrit, l’assemblée a donné au sieur Gand pouvoir de faire une sommation à l’abbé de Saint-Maximim de Trêves, signée par les officiers de l’assemblée.

 

[1] Depuis 1721 c’est Jean François de Creil de Bournezeau, baron de Brillac

Le 10 mai 1737, sommation est faite à l’abbé de Saint-Maximim de Trêves.

 

Le 15 mai, la réponse est négative donc le 17 juin 1737, l’assemblée de Thionville est résolue à envoyer une copie du dossier au sieur Desjardins [1], procureur au Parlement de Metz et de cette ville, pour prendre avis de trois avocats.

Le 22 juin, la consultation des avocats signée de Vannier, Vigum et Gabriel avocats à la cour, donne raison aux paroissiens de Thionville et les trouve fondés à former une demande contre Saint-Maximim de Trêves en qualité de curé primitif et gros décimateur. Les avocats conseillent de s’adresser en première instance au lieutenant général du bailliage de Thionville pour faire saisir les dîmes de Saint-Maximim de Trêves.

Le 26 juin, la ville se dit résolue d’agir en conséquence et de poursuivre jusqu’à l’arrêt définitif au Parlement de Metz, elle obtient l’approbation du subdélégué de l’intendant le 29 juin 1737.

Le 5 juillet 1737, monseigneur Claude de Saint-Simon, évêque de Metz prend l’ordonnance suivante :

« Vu le procès verbal de la visite de l’église de Thionville faite le 11 juin par le sieur Louis, curé d’Usselkirch et archiprêtre de Thionville, nous ordonnons que l’église sera agrandie de façon qu’elle puisse contenir commodément les habitants de la paroisse et attendu l’inexécution des ordonnances précédentes rendues par nous ou nos prédécesseurs, nous déclarons que l’église sera interdite de fait au 15 octobre 1737, nous exhortons les habitants de Thionville et nommément les magistrats et synodaux de faire toutes diligences possibles, afin d’y contraindre ceux aux frais de qui l’agrandissement doit être fait [2]. Nous retenons de l’interdiction la chapelle du Rosaire [3] dont le sieur Everling est titulaire. »

Le 9 juillet 1737, le même évêque écrit à monsieur Wolkringer, maire de Thionville :

« Vous devez avoir appris que j’ai rendu une ordonnance qui enjoint l’agrandissement de l’église de votre ville sous peine d’interdiction, afin que les officiers de l’hôtel de ville soient encore plus autorisés à faire les diligences nécessaires pour obliger les gros décimateurs à remplir leurs obligations. Vous devez être persuadé que j’emploierai tout ce qui dépend de moi pour soutenir mon ouvrage et vous procurer les moyens de faire exécuter mon ordonnance. Quand vous aurez besoin d’être à nouveau autorisé par monsieur l’intendant, donnez m’en avis et j’agirai auprès de lui. »

Mais voilà le temps passe et rien ne se passe côte Saint-Maximim de Trêve!

Il faut préciser que l’évêque Claude de Saint-Simon était en délicatesse avec le Parlement de Metz  et que souvent ces demandes n’avaient pas l’accueil espéré.

Le 7 novembre 1739, la chambre ou assemblée de Thionville se réunit avec le bailliage et les notables de la ville pour un point de la situation.

 


[1] Claude Desjardins procureur au Parlement de Metz depuis 1695

[2] On remarquera que l’abbaye Saint-Maximim n’est pas citée

[3]  La chapelle du Rosaire se trouvait au sous/sol du beffroi de Thionville.

Il ressort de cette réunion que le dossier n’a guère avancé, la ville a été déboutée, de sa demande de se pourvoir contre l’abbé prieur de l’abbaye de Saint-Maximim de Trêves qui est le curé primitif et collateur de la paroisse et décimateur dans toute l’étendu du ban, par le parlement de Metz à cause de la jurisprudence qui y est pratiquée de tous temps.  En conséquence, elle va se pourvoir en cassation pour faire condamner l’abbaye à agrandir l’église et faire lever l’interdit qui est prononcé au 1er février 1740, car il a déjà été repoussé plusieurs fois.

Signé de :

Wolkringer, maire,

Brousse fils et Larminat, échevins,

Larminat et Metzinger députés du bailliage,

Soucelier, syndic,

Dumaire, receveur,

 Handry, Bonnaventure, Louis, Debatz et Hennequin notables.

Sceau de cire rouge de la ville de Thionville de 1739 (Photo Michel Persin)

Sceau de cire rouge de la ville de Thionville de 1739 (Photo Michel Persin)

Comme on le voit, la ville n’a guère de poids dans cette affaire et doit pour agir avoir l’aval du subdélégué de l’intendant, de l’intendant, du Parlement de Metz, du conseil du Roi et l’accord « écrit » de l’abbé de l’abbaye de Saint-Maximim de Trêves sur le fait qu’il soit disposé à payer les travaux, la ville donnant le terrain.

Encore quelques  réunions et courriers à venir ! 

 

A suivre…

 

Archives municipales de Thionville. Notes Braubach BB8/14/22/27/34/3644

 

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30 août 1705 - Fête à Volkrange (fin)

Publié le par Persin Michel

Avant de clore l'histoire de l'incident du 30 août 1705 à la fête de Volkrange, je voudrais faire une petite apartée au sujet de mon dernier livre "Patrimoine" dont la souscription est désormais close. L'ouvrage va maintenant entrer en fabrication.

Un ouvrage de ce type, très spécialisé et donc avec un tirage restreint et une diffusion identique ne peut être édité qu'avec un minimum de soutien institutionnel.

Ce soutien, je l'ai trouvé auprès de la mairie de Thionville:  Mme Anne Grommerch, députée-maire de Thionville et  M. Jackie Helfgott, adjoint à la culture, patrimoine, tourisme et transport ainsi qu'aux services de la mairie; à la direction de la communication et principalement aux services des archives municipales avec ses principaux animateurs: M. Dominique Laglasse et Frédérique Gaudinet

Je voudrais aussi remercier le journal "Le Républicain Lorrain" en la personne de ses correspondants locaux: Mme Claudette Marion et M. Michel Croué.

 

Fête de Volkrange du 30 août 1705 (fin de l'affaire)

 

Nous avons donc vu que Volkrange  avait  deux seigneurs fonciers :

Jean Mathias de Bock et Jean de Pouilly, chacun pour une moitié de la seigneurie. Jean de Pouilly étant aussi seigneur de Beuvange. Ce sont des seigneurs fonciers, la haute justice relève de la prévôté de Thionville puis du bailliage.

Jean Mathias de Bock habite une maison à côté du château et Jean de Pouilly habite le château, dont une petite partie avait appartenu à la famille Hue de Saint-Rémy.

Jean de Pouilly fera restaurer le château et y habitera avec sa famille, mais en quelque sorte assiégé par les propriétés de Jean Mathias de Bock, comme le montre le plan ci-dessous daté de 1712.

Schéma des maisons et voies d'accès

Schéma des maisons et voies d'accès

Comme on le voit sur ce plan, la disposition du château, des maisons de Jean Mathias de Bock et les chemins d’accès ne pouvait que favoriser les conflits entre les deux familles, mais nous y reviendrons quand nous parlerons du conflit des « barrières » .

Plusieurs actes notariés nous renseignent un peu plus sur la vie de la famille de Pouilly :

Le 7 décembre 1684

« Jean de Pouilly, écuyer, seigneur en partie de Volkrange et de Baranzy et Eléonore de Roly son épouse  déclarent qu’en vertu de la bonne amitié qu’ils se portent et qu’afin de donner au survivant d’entre eux les moyens de survivre honnêtement suivant leur qualité et condition et pour autres bonnes causes et considérations, elles se donnent réciproquement par donation à cause de mort et au survivant, outre la succession mobilière, la somme de 3000 écus soit 9000 livres tournois [1] à prendre sur la partie des biens qu’ils ont acquis pendant leur mariage… En ménageant l’héritage de leur fille et de leur fils, Marie Christine et Isaïe de Pouilly… » Extrait.

Le 7 février 1687

« Convention de mariage entre Marie Christine de Pouilly, fille de Jean de Pouilly et Eléonore de Roly, avec messire Ferry Joseph de Roly âgé de 30 ans environ, fils du baron Jean de Roly, seigneur de Sartenfagne et Villenfagne [2].  Est présent aussi, Isaïe de Pouilly, le frère de la mariée… » Extrait [3]

19 février 1693

« Il est stipulé que Françoise de Saintignon, résidente à Mersch devant Virton, étant présente ce jour au château de Volkrange, déclare que de son bon gré et volonté, sans aucune contrainte, qu’ elle décharge par la présente, le sieur François Isaïe de Pouilly, écuyer, seigneur de Volkrange (avec son père Jean) de tous les intérêts civils, réparations et dommages qu’elle pourrait avoir à prétendre contre ledit seigneur de Pouilly au sujet de la compagnie et copulation charnelle qu’il a eu avec elle et dont elle est devenue enceinte et a ensuite accouché d’un garçon nommé Adrien et baptisé en l’église paroissiale de Mersch.

Elle promet de l’élever en religion catholique apostolique et romaine et duquel elle décharge le sieur de Pouilly. Elle décharge aussi le sieur de Pouilly de toutes actions et prétentions auxquelles elle pourrait prétendre et consent qu’il contracte mariage et épouse qui bon lui semblera sans qu’elle veuille, ni puisse s’y opposer.

En contrepartie, Jean de Pouilly, père de François Isaïe de Pouilly, consent dès maintenant et pour toujours audit Adrien, fils de la dame de Saintignon, tous les biens, droits et prétentions qu’il a en la seigneurie de Baranzy, soit rentes, revenus, terres, prés, droits seigneuriaux et ce qui en dépend pour qu’il puisse en jouir avec sa mère comme d’un bien propre à condition toutefois que s’il décédait sans laisser d’enfants légitimes procréés de son corps, lesdits biens retourneront à Jean de Pouilly, sa veuve ou ses héritiers. Si par Dieu, l’enfant Adrien décédait avant sa mère, celle-ci pourra jouir des biens, sa vie durante.

Il a été expressément stipulé que ni ledit Adrien, ni la dame de Saintignon ne pourront vendre, ni engager lesdits biens de Baranzy afin que les biens retournent au décès de la dame et dudit Adrien aux héritiers de la famille de Pouilly.


[1] Ce qui est une somme assez considérable.

[2] En Belgique

[3] François Isaïe de Pouilly se mariera avec Charlotte de Roly bien qu’ayant fait un enfant à Françoise de Saintignon. Il semble que les liens avec la famille de Roly aient été jugés plus « avantageux »

De plus, Jean de Pouilly promet de donner à la dame de Saintignon une fois pour toute et à la décharge du seigneur François Isaïe de Pouilly son fils, la somme de 50 écus blancs à 3 livres l’écu soit 150 livres tournois.

Le présent contrat est passé devant le témoin : François Robert de Nonnancourt, écuyer, seigneur de Pouilly en Meuse. Il a été accordé par le seigneur Jean de Pouilly qu’en cas de nécessité pressante, il pourra engager le bien et en disposer comme son bien propre. » Extrait

En 1694

On voit François Isaïe de Pouilly se « porter fort  [1] » pour son père Jean de Pouilly, ce qui laisse penser à un changement dans l’ordre familial.

Le 18 décembre 1704

Le roi de France, Louis XIV le Grand ayant besoin d’argent pour financer ses guerres européennes, décide de vendre les hautes justices dépendantes des bailliages. Les seigneurs fonciers qui sont par définition des seigneurs moyens et bas, achètent à bon prix la haute justice qu’il leur manquait. Ils ont  ainsi toutes les prérogatives du seigneur.

« François Isaïe de Pouilly, fils de Jean de Pouilly et d’Eléonore de Roly, achète au roi la haute justice de Volkrange et de Beuvange,  en conformité avec l’édit d’avril 1702, moyennant la somme de 1333 livres 6 sols et 8 deniers » Extrait

Par le fait, il devient donc seigneur haut, moyen et bas justicier de Volkrange, Metzange et Beuvange.

Le 20 juin 1705

« François Isaïe de Pouilly, seigneur haut justicier et foncier de Volkrange et Beuvange, assisté du sieur Fringan [2], son avocat, nous a déclaré que pour satisfaire à l’arrêt du 30 avril 1703 et à notre jugement du 19 juin 1705, il nous présente les personnes de messieurs :

 - Jean Larminat [3], conseiller du roi, receveur des espèces du siège de Thionville pour faire les fonctions de procureur fiscal de la haute justice de Volkrange et Beuvange.

 -  Martin Moine pour être le maire de la haute justice de Volkrange et Beuvange.

 - Abraham Picquart et Jacques Lefranc pour être échevins de la haute justice de Volkrange et Beuvange.

Sur le fait, tous les nommés vont prêter serment d’allégeance au seigneur François Isaïe de Pouilly.. » Extrait

Le 3 août 1705

Le seigneur haut justicier, moyen et bas de Volkrange et Beuvange, François Isaïe de Pouilly, va poser des barrières [4] (voir le plan ci-dessus) pour empêcher le sieur Jean Mathias Bock, seigneur foncier pour moitié de Volkrange, d’accéder à ses propriétés [5] sauf à passer sur son terrain devant le château,  avec tous les problèmes qui en découleront.

 

[1] Se porter caution.

[2] On retrouve là un protagoniste de l’incident à la fête le 30 août 1705.

[3] Voilà encore un protagoniste de l’incident à la fête patronale.

[4] Clayonnages de bois

[5] Sa maison située derrière le château s’appelait la « Tour de Weyler ». Le bâtiment n’existe plus aujourd’hui.

Aussi le 31 août 1705, soit le lendemain de l‘incident à la fête patronale, le sieur Jean Scharf conseiller du roi au bailliage de Thionville et commissaire nommé en cette affaire va faire témoigner les personnes suivantes afin d’apporter un peu de lumière sur les faits.

Témoins 

Jean Henry, manouvrier de Thionville âgé de 89 ans.

« Dit qu’il connaît bien les lieux et que jamais ces chemins n’ont été fermés mais toujours ouverts, il y passait à pied, à cheval et en chariot, car passer par le chemin du château n’est pas facile surtout en chariot à cause des arbres en bord de chemin, cerisiers et pruniers. »

Nicolas Euvrard, manouvrier de Thionville, âgé de 60 ans.

« Dit qu’il y 45 ans il demeurait au château avec son père et n’a jamais connu les chemins fermés. Il fait les mêmes remarques que Jean Henry. »

Jean Josse, manouvrier d’Ebange, âgé de 55 ans.

« Il dit qu’il a lui aussi demeuré au château pendant 18 ans et n’a jamais connu les chemins fermés, il va dans le même sens que les autres témoins. »

Jean Limbourg, manouvrier de Terville, âgé de 60 ans

« Il dit qu’il est natif de Volkrange, qu’il en est parti depuis 33 ans mais il a toujors connu les chemins ouverts et empruntés par tout le village. »

Nicolas Limbourg, huilier de Thionville, âgé de 55 ans

« Il dit que son père était, il y a 42 ans, admoniateur du château et que les chemins ont toujours été ouverts. »

Jacques Pescheur, laboureur de Beuvange, âgé de 75 ans.

« Il fait le même témoignages que les autres témoins. »

Jean Mathias de Bock, seigneur foncier de la moitié de la seigneurie de Volkrange, produisit un acte en allemand, traduit par le notaire Lanio, daté du 9 avril 1600 et qui prouvait que le chemin qui longeait les fossés du château était sa propriété, car acheté avec la seigneurie foncière.

Cette affaire se termina le 1er juillet 1712 par la condamnation du seigneur François Isaïe de Pouilly au profit de Jean Mathias de Bock afin qu’il puisse à nouveau accéder à ses propriétés ainsi que ses fournisseurs et visiteurs comme par le passé en empruntant les chemins habituels et traditionnels.

Conclusion :

Dans ce contexte de mésentente entre les deux co-seigneurs, l’un étant devenu en 1704 seigneur haut justicier donc de fait avec un état juridique supérieur à l’autre et le faisant sentir fortement. Alors qu’un procès est initié par Jean Mathias de Bock pour fermeture des chemins d’accès à sa maison par François Isaïe de Pouilly, on comprend mieux que la proclamation de la fête patronale du 30 août 1705, par le maire du seigneur foncier, alors que cette prérogative était réservée au seigneur haut justicier, ait déclenché cette bagarre et cet incident.

30 août 1705 - Fête à Volkrange (fin)

Epilogue

Les témoins de l’affaire de la fête paroissiale furent entendus, les personnages en cause dans cette bagarre étant des notables de la ville, impliqués dans la conduite du bailliage, l’affaire fut renvoyée au parlement de Metz, mais n’eut pas de suite fâcheuses pour les différents protagonistes que nous retrouverons tous aux mêmes postes dans les années qui suivirent.

Toutefois, l’affaire des « barrages » ajoutée à l’affaire de la « fête patronale » occasionnèrent aux deux protagonistes, Jean Mathias de Bock et François Isaïe  de Pouilly, bien des tracas en particulier à François Isaïe de Pouilly qui en 1713 vendit la seigneurie et le château de Volkrange à François de Saintignon pour 6000 livres tournois, avec quelques sécurités ; comme s’être réservé un logement au château et surtout la possibilité de racheter la seigneurie et le château au même prix, ce qu’apparemment, il fit très rapidement.

Manœuvre pour échapper à la justice ?

François Isaïe de Pouilly, mourut à Volkrange le 5 novembre 1721, âgé de 63 ans, il fut inhumé le 6 novembre 1721, dans l’église paroissiale de Volkrange, devant l’autel de la Sainte-Vierge dans le « tombeau de fer ». Il est alors désigné comme seigneur de Volkkrange, Metzange, Beuvange, Knutange et Veymerange en partie.

Cette petite histoire de pugilat à la fête patronale du village nous aura permis de regarder de plus près ces châtelains volkrangeois si chicaneurs et procéduriers.

L’origine des châtelains de Volkrange est à peu près établie, mais quelques ajustements sont à faire, principalement sur les origines et sur le lien que ce village pourrait avoir avec son homonyme de Belgique, près de Messancy.

FIN

 

 

 

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30/08/1705 Thionville-Volkrange : La fête au village (suite 1)

Publié le par Persin Michel

Dans le premier article, nous avions vu le rapport de l’incident du 30 août 1705 à la fête de Volkrange entre les protagonistes suivants :

Jean Mathias Bock par l’intermédiaire de son maire car lui était absent. Il est seigneur foncier de Volkrange pour la moitié de la seigneurie et aussi d’Algrange.

Jean Louis Larminat receveur des amendes et épices de Thionville et procureur fiscal de la seigneurie de Volkrange pour François Isaïe de Pouilly.

François Nicolas Fringan, lieutenant particulier des eaux et forêts au bailliage de Thionville

Tous ces personnages sont décrits plus précisément dans l’article précédent.

Maintenant nous allons voir les autres personnages de cette affaire.

Jean de Pouilly, seigneur haut-justicier de Volkrange, Metzange et Beuvange et seigneur foncier pour la moitié de la seigneurie de Volkrange. Donc co-seigneur foncier avec Jean Mathias Bock de Volkrange.

Isaïe de Pouilly, fils de Jean de Pouilly qui hérite de son père et prend les mêmes titres.

Le sieur de Rolly qui est le beau frère de François Isaïe de Pouilly.

 

La famille de Pouilly: Elle porte d’argent au lion d’azur, armé, lampassé et couronné de gueules

La famille de Pouilly: Elle porte d’argent au lion d’azur, armé, lampassé et couronné de gueules

La famille de Pouilly :

C’est une des plus anciennes familles de chevalerie Lorraine que l’on retrouve déjà vers le 10ème siècle dans la maison forte de Pouilly sur Meuse, proche de Stenay, avec Victor d’Ardenne ou Victor de Pouilly surnommé « L’exterminateur de Normands ».

Elle participa aux croisades en 1096, en 1145 et en 1250, puis elle servit avec dévouement, la France mais aussi l’Allemagne, la branche cadette servit les ducs de Lorraine et  donna à Stenay une dizaine de gouverneurs. Elle s’allia avec les grandes familles lorraines et luxembourgeoises. (Voir sur Gallica : De Pouilly, sires et barons de Cornay et d’Inor… 1865).

Au 17ème siècle,  le village de Rutz ou Ruptz, actuellement Rupt-sur-Othain [1] , est propriété pour moitié de Isaye de Villechole qui est aussi seigneur de Breux et de Ville-devant Raucourt à cause de son épouse Françoise de Sterpigny-Waha-Fronville. Il obtiendra le 26 mars 1609, du duc Henry II de Lorraine, la permission de réédifier le signe patibulaire donc le signe de la haute, moyenne et basse justice sur ce village. Isaye de Carpentier de Villechole [2] eut une fille, Antoinette Carpentier de Villecholle qui épousa Jean II de Pouilly des Ancherins, lequel devint par ce mariage seigneur de Rutz, la famille sera aussi propriétaire en partie des seigneuries de Boureuilles, Cussigny, Porcheresse et autres lieux.

De cette union entre Jean II de Pouilly et Antoinette Carpentier de Villechole, naitra le 11 décembre 1621, Jean III de Pouilly qui épousera le 12 novembre 1649, Eléonore de Roly, de la maison de Roly, originaire du pays de Liège qui se fixa à Roly , village proche de Givet et où subsiste un château maintes fois remanié ayant appartenu à cette famille. Cette famille fut aussi alliée à la famille de Villechole.

Si la famille de Pouilly a été globalement bien étudiée [3] la branche qui nous concerne ici ne l’a jamais véritablement été.

Donc, nous avons ici Jean de Pouilly et Eléonore de Roly, ils se sont donc mariés le 12 novembre 1649 et réside à Grand-Failly où vont naître leurs enfants. Jean de Pouilly est alors désigné comme seigneur foncier de Baranzy proche de Longwy.

Le 16 septembre 1652, naît à Grand-Failly, leur fils, Isay (Isaïe) de Pouilly dont le parrain est Isay de Pouilly, seigneur de Rutz (Rupt) et la marraine ,Jeanne de Pouilly veuve de monseigneur de Saintignon, et dame de Grand-Failly .

 


[1]  A 60 km de Volkrange.

[2]  Vieille famille noble de la région d’Amiens/Saint-Quentin.

[3] Dans l’annuaire historique de l’ancienne noblesse de France par M. de Saint-Allais – Paris 1835

 

Ferme château de Roly

Ferme château de Roly

Le 9 août 1653, naît à Grand-Failly, une fille, Jeanne Thérèse. Son père, Jean de Pouilly est présenté comme seigneur de Baranzy (près de Longwy) et sa mère est bien Eléonore de Roly. Le parrain est Claude de Beauchamp, seigneur de Thonnelalong (Thonne-la-long proche d’Avioth) et la marraine est mademoiselle Jeanne de Villechalle (Villechole) de Picardie.

Naissance d'Isaïe François de Pouilly à Grand-Faily

Naissance d'Isaïe François de Pouilly à Grand-Faily

Naissance de Jeanne Thérèse de Pouilly à Grand-Failly

Naissance de Jeanne Thérèse de Pouilly à Grand-Failly

Les noms du parrain et de la marraine, nous donnent ici de bonnes indications sur la famille proche, ce sont des personnages que l’on retrouve très souvent dans les divers actes concernant la famille de Pouilly.

Une autre fille de Jean de Pouilly et Eléonore de Roly naîtra un peu plus tard, sans doute à Mercy-le-bas dont Jean de Pouilly était devenu seigneur foncier par héritage de la famille de Saintignon. Malheureusement les registres de Mercy-le-Bas ne commencent qu’en 1765.

Toutefois, nous retrouvons le nom de cette fille, Marie Christine de Pouilly,  dans plusieurs actes, dont celui de sa convention de mariage en date du 7 février 1687, avec Ferry Joseph de Roly, âgé de 30 ans, fils de Jean, baron de Roly, seigneur de Sart-en-Fagne et Ville-en-Fagne (Belgique) et autres lieux et  de madame Marie de Fournet. Dans cette convention son frère, Isay de Pouilly est également nommé, tout comme ses parents : Jean de Pouilly, écuyer, dit seigneur de Baranzy et de Volkrange et Eléonore de Roly, veuve en première noce de Pierre de Chaumont.

Jean de Pouilly est dans ce document désigné comme seigneur foncier de Volkrange, nous le savions seigneur foncier de Mercy-le-Bas et de Baranzy. Dorénavant il ne sera plus désigné que seigneur de Volkrange et de Baranzy, le village de Mercy-le-bas n’apparaître plus. Il a probablement vendu cette seigneurie foncière pour acquérir, le 11 décembre 1671 et pour une somme de 1400 patagons [1], la moitié de la seigneurie foncière de Volkrange .

Il a acheté cette moitié de seigneurie foncière à Anne Marie de Nassau sœur de Marie Elisabeth de Nassau, seule héritière du domaine mais qui décéda avant sa sœur et sans enfant. L’autre moitié de la seigneurie foncière de Volkrange était la propriété de François Hue de Saint-Rémy. Donc vers 1681, la seigneurie foncière de Volkrange avec son château appartient à deux co-seigneurs : Jean de Pouilly et François Hue de Saint-Rémy.

Le château n’est plus habité, il est en très mauvais état, pratiquement en ruine et couvert de paille, ayant subit les affres des deux sièges de Thionville de 1639 [2] et 1643 puis les faits de guerre du Maréchal de Créquy.  C’est Jean de Pouilly qui le fera restaurer.

 

[1]  Monnaie  d’or et d’argent créée en 1612,  sous le règne des archiducs Albert et Isabelle (1598 à 1621) et qui connut dans les Pays-Bas et au dehors une grande renommée. Du patagon est dérivé le patard que les villageois de nos villages utilisaient pour payer entre autre, le droit de four banal.

[2] Les plus gros dégâts eurent probablement lieu en 1639 quand la bataille fit rage du côté de Volkrange entre les troupes françaises et les troupes « espagnoles »

La famille de Pouilly donna aussi à l’abbaye de Clairefontaine proche de Virton deux abbesses : Marguerite de Pouilly décédée le 8 décembre 1671 et Antoinette Lucie de Pouilly décédée le 9 juillet 1696, il faut noter que lui succéda Marguerite Josèphe de la Fontaine qui était d’une famille alliée au Pouilly et qui fit rebâtir le monastère, elle décédera le 29 mai 1734 regrettée de tous.

 

Résumons un peu :

En 1671, Jean de Pouilly et Eléonore de Roly, originaires du pays haut et de la Gaume, aujourd’hui en Belgique, sont détenteurs, tout ou partie, de la seigneurie foncière de Mercy-le-Bas et de Baranzy. Ils achètent pour 1400 patagons, la moitié de la seigneurie foncière de Volkrange, en se séparant de celle de Mercy-le-Bas et en gardant celle de Baranzy.

L’autre moitié de la seigneurie foncière de Volkrange est dans les mains de François Hue de Saint-Rémy.

La seigneurie de Volkrange est alors une seigneurie moyenne et basse soit foncière car la haute justice de Volkrange est du ressort de la prévôté de Thionville.

Ils ont eu plusieurs enfants, seuls deux seront cités dans les documents afférents à Volkrange : Isaïe François de Pouilly et sa soeur  Marie Christine de Pouilly.

Le château ou maison forte de Volkrange qui fait partie de la seigneurie foncière de Volkrange acheté par Jean de Pouilly est pratiquement en ruine et Jean de Pouilly le fera restaurer ou plus exactement reconstruire.

Eléonore de Roly va décéder à Volkrange le 7 février 1702 et son mari, Jean de Pouilly décédera également à Volkrange le 9 avril 1707. Ils seront tous les deux inhumés dans l’église paroissiale devant l’autel de la vierge dans le « tombeau de fer ».

Nous verrons dans un prochain article comment va évoluer la situation de la seigneurie sous l’égide du fils François Isaïe de Pouilly et ce que deviendra sa sœur Marie Christine de Pouilly. Nous verrons alors pourquoi nous sommes arrivés dans la situation explosive de la fête patronale du 30 août 1705.

A bientôt

 

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