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thionville 17eme siecle

Thionville – Confréries et corporations (3ème partie)

Publié le par Persin Michel

Dans l’article précédent nous avons vu qu’au début du 18èmesiècle les tanneurs et les cordonniers de Thionville exerçaient les mêmes activités, ce qui nuisait à une saine concurrence. Nous avons vu aussi que la ville souhaitait remédier à cet état de chose qui semblait durer depuis longtemps. Effectivement un acte du 15 février 1663, nous confirme qu‘au milieu du 17èmesiècle à Thionville, les tanneurs et les cordonniers étaient regroupés au sein de la même corporation.
Résumé de l’acte en question :
« Devant les notaires royaux sont comparus Jean Nicolas Fridrich, conseiller du roi au bailliage de Thionville ave Jean Ranckendall (tanneur) et Pierre Gascher (cordonnier) tous les deux maîtres des métiers de tanneurs et cordonniers et en présence de trois confrères desdits métiers qui nous ont déclaré :
Vouloir faire l’échange avec la permission et autorisation du seigneur Hue de Saint-Rémy, écuyer, seigneur de Gras, conseiller du roi et lieutenant général civil et criminel au bailliage de Thionville, permission donnée le 6 février de l’année 1663 à la requête que lui avait présenté les maîtres et confrères des métiers de tanneurs et cordonniers. L’échange ainsi autorisé est perpétuel et irrévocable et consiste en la cession au sieur Jean Nicolas Fridrich et à demoiselle Anne Elisabeth Vogtin son épouse d’une partie de maison qui leur appartient sur la place vis à vis la chapelle de l’hôpital, les héritiers du défunt Hyet d’un côté et le l’autre Mathieu Fridrich. Celui-ci avec son épouse cède aux maîtres des métiers une maison située à Thionville vis à vis de la grange du sieur Kirchbaum, la veuve du sieur Rochefort, Marguerite Klein d’un côté et la rue de l’autre côté, la maison faisant le coin de la rue.
Cette maison, le sieur Fridrich l’avait rachetée à Jean Edinger, échevin de Thionville, qui avait acheté cette maison des sieurs Demauth et Fonck, commissaires établis et autorisés par décret de justice du 22 octobre 1653 au nom de la demoiselle Marguerite Klein pour son entretien.
Les « Fridrich » ont donné la somme de 420 francs de Luxembourg pour la partie de maison des maîtres des métiers qui avait été engagée à feu Georges Reinard.
Fait à Thionville le 15 février 1663
Ci-dessus un extrait de l’acte

Ci-dessus un extrait de l’acte

On voit là que les maîtres des métiers des tanneurs et cordonniers possédaient en commun une partie de maison située en centre-ville, sur la place du marché, proche du beffroi où se trouvait alors la chapelle de l’hôpital dite de Sainte-Elisabeth. Maison commune au corps des métiers qu’ils vont échanger avec une autre maison située au coin d’une rue. On voit aussi que cette transaction se fait avec l’autorisation du lieutenant général du bailliage [1]et qu’elle implique des officiers de l’hôtel de ville.
On voit encore que Mathieu Fridrich habite avec son épouse la maison attenante d’un coté à celle du corps des métiers. Cela lui permet de posséder dorénavant deux maisons contigües pour en faire une maison plus importante.
On remarquera aussi que Jean Nicolas Fridrich et Mathieu Fridrich sont probablement de la même famille et que Jean Nicolas Fridrich est alors conseiller du roi au tout nouveau bailliage, il deviendra par la suite receveur des finances du roi et échevin de la ville.
Mais plus encore, Jean Nicolas Fridrich, sera à l’initiative avec le gouverneur de la ville, Du Fey de la Garenne, de la création le 4 avril 1666, de la confrérie du Rosaire qui élira domicile dans la chapelle Sainte-Elisabeth de l’hôpital, à côté du beffroi actuel, et qui prendra et sera connue à Thionville pendant de nombreuses années sous le nom de « chapelle du Rosaire ». La maison ainsi échangée qui appartiendra dorénavant à Mathieu Fridrich se situera donc vis à vis de la chapelle de la confrérie du Rosaire.
Cette maison des métiers qui vient d’être échangée était une maison de rapport pour le corps des métiers, tanneurs et cordonniers. Ils n’y pratiquaient pas leur métier qui pour les tanneurs, chacun le sait est source de nuisances olfactives et visuelles. Non, les opérations de tannage se pratiquaient dans leur maison ou atelier loin du centre-ville, plutôt vers les remparts, le long des fossés entourant la ville. Ces activités de tannage étaient donc une source de désagréments pour la ville aussi à l’été 1690, la ville ordonna aux tanneurs de retirer leurs tanneries de leur maison en la ville et d’aller les installer à Beauregard sur la rivière Fensch qui alimentait plusieurs moulins dont un moulin à foulon appartenant au corps des drapiers et sans doute un moulin à écorce produisant le tan pour le tannage des peaux.
La ville donna à cette occasion aux tanneurs des terrains le long de la Fensch pour qu’ils s’y installent, ce qu’ils firent. Et dès novembre 1690, la ville demanda aux tanneurs de payer annuellement une taxe pour l’occupation des tanneries.
La taxe requise était proportionnée à la surface des terrains concédés et payable à la Saint-Rémy, dès 1692. Nous en avons une liste qui suit : (Sous réserve de l’orthographe)

[1]Bailliage créé le 22 avril 1662 donc très peu de temps avant cette transaction

Mathis Bonjean 25 sols tournois
Valentin Nonchel 12 sols et 6 deniers tournois
Didier Fichault 12 sols et 6 deniers tournois
Jean Pierre 30 sols et 6 deniers tournois
Arnouldt Husange 15 sols tournois            
Nicolas Reuter 12 sols et 6 deniers tournois
Jean Georges Geisweiler 12 sols et 6 deniers tournois
George Oberboren 16 sols et 3 deniers tournois
Pierre le Moine 15 sols tournois
Nicolas Reulaut 15 sols tournois
Jacob Seftor   15 sols tournois
Extrait d’un plan du milieu du 19ème siècle où l’on voit un moulin à écorce et les tanneries sur le canal de la Fensch à Beauregard. La ville se trouve vers la droite  Ce canal de la Fensch alimentait ensuite le moulin à farine de la ville qui se situait à la porte de Metz et qui deviendra le moulin « Nouviaire » donnant sur la place Marie-Louise. (Il est en cours de destruction pour laisser la place à une résidence moderne.)

Extrait d’un plan du milieu du 19ème siècle où l’on voit un moulin à écorce et les tanneries sur le canal de la Fensch à Beauregard. La ville se trouve vers la droite Ce canal de la Fensch alimentait ensuite le moulin à farine de la ville qui se situait à la porte de Metz et qui deviendra le moulin « Nouviaire » donnant sur la place Marie-Louise. (Il est en cours de destruction pour laisser la place à une résidence moderne.)

Les peaux :
Les tanneurs se procuraient les différentes peaux [1]dont ils avaient besoin auprès des bouchers de la ville mais aussi auprès du bourreau de la ville [2]concernant les animaux errants, malades ou les veaux morts nés dont la peau servait à faire le « velin » pour les articles en cuir fin.
Certains tanneurs les plus fortunés, sélectionnaient leurs animaux sur pied et les mettaient en pension chez un des fermiers des alentours de la ville avant de les livrer au boucher et d’en récupérer les peaux. Ils faisaient ainsi des plus-values intéressantes.

[1]Vaches, veaux et taureau, moutons, agneaux et porcs 

[2]Au 17èmeet 18èmesiècle, les bourreaux de la ville étaient Jean Pierre Dalembourg puis son fils Jean Dalembourg. Ils étaient maîtres des hautes et basses œuvres pour le bailliage. Les basses œuvres consistaient justement à faire l’équarrissage des animaux morts dont les veaux mort-nés

L’acte du 25 février 1732, nous relate cette façon de procéder :
«  Par devant nous notaires royaux de Thionville sont comparus en personne Balthazar Schweitzer, laboureur à la cense de Wonnerhoff (Marienthal à Guentrange) et son épouse Catherine Gloting. Ils ont reconnu tenir comme hôte suivant l’usage du pays, du sieur André Wolkringer, marchand tanneur de Thionville, les animaux suivants :
- 6 vaches dont 4 sans poil noir, 1 rouge, une autre noire à tête blanche.
- 2 génisses dont 1 rouge et 1 noire.
- 1 taureau sans poil rouge.
- 42 bêtes blanches tant brebis que moutons.
Le montant de la pension estimée à l’amiable est de 287 livres tournois que le sieur Wolkringer a payé réellement au comptant pour nourrir, héberger et entretenir les bêtes à leurs frais et cela pendant trois années.
L’acte est rédigé en français mais expliqué en allemand. Ledit Schweitzer et son épouse ne savent pas écrire et font leur marque. Le sieur Wolkringer signe avec nous notaires. »
Thionville – Confréries et corporations (3ème partie)
Dans cet acte nous voyons bien l’importance attachée aux types d’animaux et à leur peau, couleur et poils, éléments de qualité pour le tanneur. Cette façon de faire permettait aussi au tanneur d’acheter des bêtes encore jeunes et de les faire engraisser en espérant en retirer un meilleur prix à la revente.
J’en terminerai ici avec les tanneurs et cordonniers, dans le prochain article nous verrons d’autres corporations et confréries de Thionville comme la "confrérie du Rosaire" rare confrérie thionvilloise strictement religieuse non rattachée à une corporation.
Sources :
Actes notariés aux ADM – Helminger 3E7520 à 3E7538 Bonjean 3E7806 à 7850
Archives communales de Thionville - Cadastre 19èmesiècle

 

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1679 – Thionville - Une « Batterie » se règle à l’amiable

Publié le par Persin Michel

1679 – Thionville - Une « Batterie » se règle à l’amiable
Un petit acte qui traite de la façon dont s’est soldé une « batterie dans le vin » entre les enfants d’habitants de Veymerange, d’Elange et de Thionville.
Mais c’est quoi « Une batterie dans le vin » ?
C’est une altercation, une bagarre sous l’emprise de l’alcool.
Alors voilà notre petite affaire :
Quelques jours avant le 4 novembre 1679, une bagarre a eu lieu entre des enfants alcoolisés. Un clan regroupant des enfants d’habitants de Veymerange et d’Elange et un clan regroupant des enfants d’habitants de Thionville.
Parents
De Veymerange : 
Mathieu Weiss
Jean Oswalt
Nicolas Oswalt
Thiel Oswalt
D’Elange :
Rémy Schweitzer
Nicolas Hirtzberger
Jean Schweitzer
Parents :
De Thionville :
Jacob Gascher
André Allerbourg
La veuve Vincent Thilleux dit la « Fortune »
On ne connaît pas les raisons de l’altercation mais nous savons qu’elle fit des blessés parmi les enfants du clan de Thionville.
Quelques précisions sur les protagonistes de cette affaire :
Veymerange :
Mathieu ou Mathis Weiss exerçait la profession de maréchal-ferrant à Veymernage, il était le père de Damien Weiss qui sera comme son père maître maréchal-ferrant et maire de Veymerange.
La famille Oswalt est une famille de laboureurs de Veymerange.
Jean Oswalt était marié à Elisabeth Pierre
Nicolas Oswalt était marié à Catherine Noël
Elange :
Rémy Schweitzer, laboureur, est alors le maire d’Elange et faisait partie de l’importante famille Schweitzer qui tenait plusieurs grosses métairies autour de Thionville. 
Remy Schweitzer sera d’ailleurs le fermier de la cense de Vonnerhof ou Marienthal à Thionville-Guentrange de 1697 à 1715. Il était marié à Marguerite Koch dite aussi Preisch.
Jean Schweitzer est le frère de Rémy, comme lui, il est laboureur, marié à Barbe Wulferts d’Entrange.
Leur père était Guillaume Schweitzer qui avait passer le bail perpétuel de la métairie de l’hôpital de Thionville en 1665. Ce bail sera hérité par Nicolas Schweitzer.
Thionville :
Jacob Gascher était marié à Angélique Hym. La famille Gascher est une ancienne famille de Thionville dont plusieurs membres furent des marchands et artisans en particulier des cordonniers.
André Allerbourg était marié à Claire Paternoster, connu comme laboureur à la Briquerie.
La veuve de Vincent Thilleu semble être soit une veuve de militaire ou éventuellement d’un artisan car ceux-ci portaient souvent des surnoms.
Les sept habitants de Veymerange et d’Elange vont comparaître le 4 novembre 1679 devant le notaire Helminger de Thionville pour déclarer qu’ils s’étaient accordés à l’amiable pour éviter de plus grands frais et une procédure judiciaire avec les trois habitants de Thionville au nom de leurs fils qu‘après la « batterie entre eux faite dans le vin » ils avaient promis de donner et de payer audits blessés, enfants des comparants, une somme de vingt-huit écus blancs et demi [1], sans préjudice néanmoins de l’amende du roi et du paiement du chirurgien, payable dans les 15 jours et même ont promis de faire « monter le fusil en question »[2]à leurs frais et dépens.
En foi de quoi ceux de Veymerange et d’Elange se sont solidairement obligés l’un envers l’autre, sans division, ni discussion, ni renoncement, le tout fait et passé à Thionville le 4 novembre 1679 puis tous ont fait leur marque n’ayant l’usage d’écrire.
 

[1]Soit aux alentours de 100 livres tournois, ce qui est déjà une somme assez importante

[2]Phrase assez mystérieuse !

1679 – Thionville - Une « Batterie » se règle à l’amiable
Voilà, comme l’on s’arrangeait à l’époque afin d’éviter de plus graves ennuis envers les autorités. On préférait le contrat devant notaire, plus souple et moins onéreux. C’était une façon de faire que l’on retrouvait souvent dans les actes notariés en cas de litige.
Dans mes prochains articles, nous allons regarder d’un peu plus près les corporations et les confréries de Thionville sous l’ancien régime. Effectivement nous pouvons assimiler ses corporations et confréries aux associations actuelles [1], voir aux syndicats.
Sous l’ancien régime, elles furent nombreuses, riches et très importantes dans la vie de la cité qu’elles animaient. Pourtant, elles sont pratiquement absentes de tous les ouvrages parus sur l’histoire de notre ville car elles n’ont laissé dans nos différents services d’archives que peu de documents exploitables.
Pourtant, il en existe quelques-uns qui vont nous permettre de mieux comprendre leur place dans la communauté thionvilloise.
A bientôt et bonne lecture
 

[1]En Moselle, il existe aux alentours de 12000 à 13000 associations divers qui recouvrent pratiquement tous les domaines d’activités. Thionville en compte plusieurs centaines qui regroupent une part importante de la population d’où l’intérêt qu’elles suscitent chez nos politiques.

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1698 – Entrange avait été abandonné plusieurs années

Publié le par Persin Michel

Vous trouverez ci-dessous un document sur le remembrement d'Entrange après l'abandon du village suite à la guerre de Trente ans, ce qui fera le lien avec mon article précédent.

« Cependant peu de doutes ne peuvent subsister sur la pauvreté structurelle des habitants et des villages autour de Thionville au sortir de cette terrible guerre de Trente ans. » 

 

Voici un document qui confirme cet état de fait et qui nous montre aussi une autre réalité ; la désorganisation totale des villages et l’obligation qui s’est faite jour de reconstruire la typicité villageoise.

 

Le document est comme toujours très formel et redondant en voici donc une version quelque peu simplifiée.

« Par devant les maires et gens de justice d’Entrange sont comparus les habitants et portériens [1]du village, bans et finages dudit Entrange.

 

Lesquels nous ont déclaré que les guerres passées ont tellement désolé le village d’Entrange que ledit village a été abandonné plusieurs années, les titres, papiers et enseignements de leurs propriétés perdus en sorte que ceux qui sont revenus s’installer audit village se sont mis en possession des biens que bon leur a semblé et ont exploité la terre à leur fantaisie, changeant à des endroits la surface de la terre en sorte qu’à présent il n’y a que désordre et confusion dans le ban d’Entrange.

 

Pour remédier à un si grand désordre et définir les propriétés qui peuvent légitimement leur appartenir les très vénérables abbés de Munster les Luxembourg [2], les seigneurs haut, moyen, bas et foncier d’Entrange, après mûre délibération, consentement et agrément ont convenu ce qui suit :

 

Par les présentent ils ont soumis toutes leurs possessions et héritages tant en terres qu’en vignobles au partage général et au jugement de monseigneur Jean Nicolas Bock, conseiller du roi, lieutenant particulier au bailliage et siège royal de Thionville qu’ils ont choisi et nommé pour adjuger et distribuer les bons, médiocres et moindres cantons du village qui sont pour le moment indivis. Que pour les maisons et masures en fonction de leur superficie ils devront payer les rentes seigneuriales inscrite au rentier [3]de l’abbaye. Rentier qui sera mis à disposition du sieur Bock et comme cela il n’y aura pas besoin de lettres de chancelleries ni autre forme de publication pour faire les attributions.

 

Le ban sera toisé [4]par l’arpenteur Antoine Duseuf aidé par les experts nommés qui suivent :

Jacob Scheneider, Jean Schweitzer le jeune et les lots seront attribués par tirage comme suit :

 

Les comparants seront tenus de tirer en chaque saison par trois fois, c’est à dire une fois aux bons cantons, une fois aux cantons médiocres et une fois aux moindres-cantons.

Il sera procédé de la même façon pour les prés. Pour les vignobles qui seront toisés, chacun demeurera en sa possession s’il peut prouver la propriété par titres ou possession reconnue et pour y parvenir avec plus de facilité ce sont les experts qui trancheront en homme d’honneur et de confiance.

Les comparants devront se contenter des héritages qu’ils obtiendront et ne jamais contrevenir directement ou indirectement à leur attribution sous peine d’amende de 300 livres tournois à payer à ceux qui se contenteront. Ceux qui plaideront, le feront à leurs dépens, dommages et intérêts et les plaintes ne seront pas communautaires.

A l’égard des maisons et masures, les jardins seront ajustés à chacun à l’arrière de ladite maison ou à côté au mieux qu’il pourra se faire pour la commodité de chacun.

 

Chacun recevra un papier terrier en forme contenant la situation, longueur et largeur des héritages qui sera signé de l’arpenteur et des experts et qui leur servira de titres dorénavant.

 

Lecture a été faite à tous par le greffier Jean Christiany et tous ont signé ou fait leur marque audit Entrange le 22 novembre 1698. »

 

[1]Les propriétaires

[2]Abbaye de moines bénédictins

[3]Etat des rentes perçues par l’abbaye pour chaque biens.

[4]Mesuré, arpenté

1698 – Entrange avait été abandonné plusieurs années
Signatures et marques des habitants

Signatures et marques des habitants

Voilà un village, Entrange,  qui est abandonné car les habitants sont, soit décédés, soit sont partis vers des cieux plus cléments, vers d’autres pays ou se sont réfugiés dans d’autres villages moins exposés. Le village est abandonné plusieurs années, les maisons se dégradent, la nature reprenant ses droits, les vergers, les champs, les vignes sont en friches et ne donnent plus rien.

 

Mais au bout de quelques années, la situation s’améliorant, quelques habitants reviennent s’installer, certains sont des anciens du village qui reprennent possession de leur biens ou pourquoi pas de biens qu’ils estiment meilleurs,  d’autres sont des étrangers et chacun va essayer de tirer son épingle du jeu sans aucun titre de propriété, sans aucun plan et donc sans payer le moindre cens au seigneur du lieu, en l’occurrence l’abbaye de Munster de Luxembourg dont le rentier ne rapporte plus rien pour Entrange.

 

Logiquement, le seigneur va effectuer ce qu’on appelle un remembrement des terres du village et les réattribuer soit à leur légitime propriétaire soit à des nouveaux venus. Nouveaux venus qui furent bien souvent des marchands ou notables de Thionville ou encore des officiers de l’armée française nouvellement installée dans la ville. On voit bien que la physionomie du village va être complétement différente d’avant l’abandon.

 

Ce genre d’événement était assez courant à cette époque, beaucoup de villages autour de Thionville ont été remembrés un peu avant 1700, ainsi en est-il de Beuvange, Veymerange en 1697 et tant d’autres encore.

 

 

Sources : ADM 3e7605-3e7527

 

 

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1668 - La seigneurie de Meilbourg (Tours - Hôtel de Créhange - Infos diverses)

Publié le par Persin Michel

Dans l’article précédent nous avions vu qu’en 1630, la seigneurie de Meilbourg que l’on disait aussi de Mirabelle appartenait dans des proportions variables à plusieurs seigneurs dont un des principaux était alors Pierre Ernest de Créhange.

 

Ayant de nombreuses dettes, Pierre Ernest de Créhange avait vendu fin 1630, sa part dans la seigneurie de Meilbourg à Jean de Bolland ancien maire de Cologne non sans avoir gardé par devers lui quelques droits particuliers.

 

Nous avions vu également que cette vaste seigneurie regroupait plusieurs villages certains proches de Thionville et d’autres assez éloignés, au Luxembourg et même en terres barroises.

 

La seigneurie comportait plusieurs maisons ou château, celui de Hombourg où résidait souvent Pierre Ernest de Créhange, celui d’Illange qui à cette époque était en ruine et que l’on tentait de reconstruire et une maison récente située au cœur de la vieille ville de Thionville, cour du château, comportant en son sein une prison, des granges et écuries

 

Les Tours dans la cour du château
1668 - La seigneurie de Meilbourg (Tours -  Hôtel de Créhange - Infos diverses)

Joignant cette maison récente de Thionville la seigneurie possédait des tours, une grosse et forte tour joignant le rempart et une autre appelée la tour « Mamille » située sur le devant de la maison et qui abritait les poudres et munitions du roi.

 

J’avais dans mon article suggéré que cette tour « Mamille » était probablement la « Tour aux puces » actuelle car nous savions que celle-ci a servi pendant longtemps de magasin aux poudres, ce qui laissait supposer qu’il y avait une autre grosse et forte tour vers le rempart. 

 

Or si cette tour dite « Mamille » était la tour aux puces cela laissait supposer qu’il y avait encore une autre grosse et forte tour proche du rempart ! 

 

Aucun texte ni plan du 17èmesiècle ne font état de plusieurs tours ni de cette appellation de « Mamille ». Je dois dire que cela m’a bien intrigué !

 

J’ai donc cherché une explication plausible à cette assertion de 1630 et à cette appellation de tour « Mamille ». J’ai trouvé ce qui suit :

 

Les héritiers de Jean de Bolland firent aveu et dénombrement de leur part dans la seigneurie de Meilbourg en 1668. [1]

 

Cet aveu reprend pratiquement mot pour mot l’acte de 1630 décrivant la seigneurie avec ses biens, droits et devoirs.

 

Le passage décrivant les châteaux est le même que celui de 1630 avec toutefois une appellation différente de la tour « Mamille » qui devient ici la tour « Gimelle »

 

[1]En 1668,les héritiers étaient le colonel Jean Jérôme de Schroetz, Ursule de Berg veuve de Volter de Jeger et Catherine de Berg sa sœur

1668 - La seigneurie de Meilbourg (Tours -  Hôtel de Créhange - Infos diverses)

Une autre différence et que les poudres et munitions sont ici réparties dans les deux tours, la grosse et forte tour du rempart et la tour « Gimelle ».

 

Autant l’appellation « Mamille’ » est mystérieuse autant celle de « Gimelle »  nous évoque immédiatement « Jumelle » et comme sur le devant du « château » de Créhange à Thionville, il existait et il existe toujours, deux tours jumelles qui encadrent la porte voûtée de la rue des clarisses, cela me semble un indice sérieux concernant cette tour « Gimelle » qui ne serait qu’une des tours jumelles.

 

 

Pour que cela nous soit confirmé, il faut cependant attendre 1778 et les démêlés judiciaires de Charles Gabriel de Gévigny, un des héritiers de Jean François de Gévigny de Pointe qui avait épousé en 1678, Marie Thérèse Catherine de Jeger, une fille d’Ursule de Berg, veuve de Wolter de Jeter. C'est par ce mariage qu'il avait hérité d'une partie de la seigneurie de Meilbourg. 

 

Effectivement, Charles Gabriel de Gévigny, qui était devenu maire de Thionville en 1766 fut emprisonné en 1769 à Metz suite à un procès avec Monsieur de Vaux, gouverneur de la ville. 

 

Il sera libéré quelques mois plus tard et il attendra dix ans afin d’obtenir réparation, mais dans l’affaire, il avait perdu des biens à Thionville dont les tours dans le château de Thionville, c’est à dire les tours jumelles et celle dite de Meilbourg qui était donc la grosse et forte tour proche le rempart soit la Tour aux puces actuelle.

 

Mécontent, il produisit plusieurs documents [1]qui attestaient que ces tours faisaient partie de la maison de Créhange et qu’elles contenaient alors des munitions et poudres de guerre pour le roi. Il n’obtient jamais la restitution des tours et vendit petit à petit une grande partie de ses biens à Thionville.

 

L’ensemble de ces documents a donc permis d’éclaircir ce passage de l’acte de 1630 concernant les tours situées dans la cour du château qui étaient donc d’une part une des tours jumelles au-dessus du passage voûté de la rue des clarisses et d’autre part la grosse et forte tour du rempart qui était la « Tour aux puces ».

 

Ces deux tours ont servi de magasin pour les poudres et munitions du roi tout en appartenant aux seigneurs successifs de Meilbourg et liées au château des Créhange.

 

Prise de possession du « château » de Créhange à Thionville

 

Nous avons vu que Pierre Ernest de Créhange, poussé par sa situation financière peu flatteuse avait vendu sa part de la seigneurie de Meilbourg fin 1630 à Jean de Boland, ancien maire de Cologne pour la somme de 24000 riesdalers, en se réservant quelques menus droits.

 

En 1632, le nouveau propriétaire, Jean de Boland, déjà âgé, (décédé à Cologne le 11 janvier 1645) demeurant à Cologne demande à son petit-fils, Jean de Berg, de se rendre à Thionville pour prendre possession en son nom du « château » de Créhange.

 

[1]Comme les aveux et dénombrements de 1722 - 1782

C’est le 25 septembre 1632 que Jean de Berg assisté d’un huissier et d’un notaire se présente à la porte de l’hôtel de Créhange dans la cour du château à Thionville.

L’officier de la seigneurie, Nicolas de Saint-Thiébault, est absent car il réside pour l’instant au château de Hombourg. On leur dit que l’on va le faire prévenir et qu’ils doivent revenir le 27 septembre.

 

Le jour dit arrivant, Jean de Berg et sa petite troupe se présentent à nouveau à la porte de l’hôtel où on leur explique que l’officier est en route et ne va pas tarder.

 

Excédé, l ‘huissier somme les personnes présentes dans le château de partir et laisser place, ce qu’ils refusent net.

 

Jean de Berg va prestement porter l’affaire devant la justice de la ville en lui demandant assistance. Celle-ci envoi au château une douzaine de personnes pour accompagner Jean de Berg, son notaire et son huissier. La porte de l’hôtel est fermée à clé et malgré les appels personne n’ouvre !

On va quérir un serrurier qui n’arrive pas à ouvrir la porte aussi on décide de la faire forcer et on découvre alors que chacune des portes intérieures est également fermées à clé. Chaque porte sera forcée, le personnel du château finalement acculé dans une dernière pièce est sommé par la justice de quitter la place. Ce qu’ils firent au moment où arrivait enfin l’officier des Créhange accompagné de la comtesse, Marie Marguerite de Coligny, en personne. Celle-ci eu beau protester, Jean de Berg put enfin prendre possession du château de Créhange au nom de Jean de Boland.

 

Pierre Ernest de Créhange mourut en 1636 et sa veuve la comtesse vendit la seigneurie de Hombourg à Joachim de Lenoncourt.

Toutefois, il semble que dans les menus droits que s’était réservé Pierre Ernest de Créhange figurait le droit d’accès au château de Créhange de Thionville et à une partie des écuries et granges. Effectivement nous voyons qu’en 1673, Catherine de Berg et Ursule de Jeger firent saisir les droits qu’avait conservés Pierre Ernest de Créhange. 

Droits consistant en l’ouverture et l’entrée libre dans l’hôtel de Créhange, une partie des granges et écuries pour lui, ses domestiques et six chevaux. Les biens saisis furent mis en adjudication et achetés par Catherine de Berg pour 800 livres tournois, elle en vendit la moitié à sa sœur Ursule de Jeger.

 

Eléments divers

 

Ce document de 1630 et celui de 1668 nous donnent encore quelques éléments intéressants, comme le fait que les fameuses tours de la cour du château étaient possédées en arrière fief depuis 1629 par les héritiers du sieur Stompheus, ancien maître échevin de Thionville [1]et qu’à ce titre ils devaient payer annuellement aux héritiers des Créhange la somme de 14 florins 4 sols.

 

On y voit aussi que le four banal d’Hettange a été abattu par les guerres, que le village a fort peu d’habitants et qu’en conséquence le four ne rapporte rien, mais que lorsque le nombre d’habitants augmentera, les seigneurs feront rebâtir le four.

 

On voit aussi que le village de Ham a été ruiné par les gens de guerre lors des sièges de Thionville en 1639 et 1643 et que les habitants sont rares, ils ne peuvent donner que 6 poules par an au lieu des 25 poules habituelles.

 

C’est la même chose à Sentzich et Molvange concernant les habitants et les fours banaux, toutefois les moulins fonctionnent encore à Hettange et à Molvange où le moulin rapporte 13 maldres de seigle, 8 livres de cire, 8 pots d’huile à brûler, 8 chapons, 100 œufs, 1 cabri et 14 florins et 4 sols en argent.

On y apprend aussi qu’existait à Illange un moulin sur la Moselle dont la pierre mâle et la pierre femelle ont été mises à l’abri au château de Créhange, de peur que les gens de guerre ne les brisent, elles seront remises en place quand le moulin sera rétabli.[2]

 

Chaque maire de chaque village de la seigneurie de Meilbourg devait aussi à Pâques un cabri et chaque meunier un porc à la Saint-Etienne.

Dans l’encart ci-dessus l’on peut lire que le meunier de Kanfen doit aussi un porc annuellement, livrable à la Saint-Etienne le lendemain de Noël à la maison de Thionville et qu’il doit avoir le même poids que le porc prévu pour le maire de Kanfen et que si le porc du maire est plus lourd que celui du seigneur, le meunier devra payer la différence en argent !.

 

On y voit aussi que les seigneurs menaient grand train et se déplaçaient avec leurs domestiques, leurs chiens et leurs chevaux mais aussi avec leurs oiseaux de proie pour la chasse par exemple pour assister au banquet annuel dit du « Prince » au château du baron d’Eltz seigneur de Kanfen [3]où il possédait une métairie en arrière-fief.[4]

 

Pour conclure, il semble évident que ces documents comportent beaucoup de devoirs des habitants envers leurs seigneurs mais fort peu de droits des seigneurs envers les habitants. Bien entendu, il est dans la nature même de ces documents de ne lister que l’ensemble des droits des seigneurs puisque se sont en quelque sorte des états de l’ensemble de leurs revenus.

 

Cependant, peu de doutes ne subsistent sur la pauvreté structurelle des habitants et des villages autour de Thionville au sortir de cette terrible guerre de Trente ans. 

 

A bientôt pour d’autres excursions historiques …

 

 

Quelques équivalences de mesures trouvées dans le document :

 

Le florin de Luxembourg est à 10 sols 

Le riesdaler patagon vaut 60 sols de France

 

Le maldre de grain vaut 4 fourreaux – 1foudre de vin vaut 24 hottes – 1 hotte vaut 20 pots 1 queue vaut 6 hottes et 4 queues valent 1 foudre.

 

[1]Le maître échevin était en fait le maire.

[2]Les fours banaux ne furent jamais rétablis, on fixa un cens à payer annuellement pour cuire à domicile. Le moulin d’Illange sur la Moselle ne fut pas reconstruit.

[3]Bernard d’Eltz était seigneur d’Ottange et de Volmerange ainsi que de Kanfen en partie.

[4]En arrière fief qui dépendait donc de la seigneurie de Meilbourg, ce banquet avait été reconduit par un arrêt du parlement de Mâlines en 15909 suite à des difficultés entre les Créhange et les Eltz

 

Sources :

 

Les seigneurs de Meilbourg par A. Plassiart – 1950 – Metz

Second compte de la seigneurie de Mirabelle  ADM – J1265

Aveu et dénombrements de 1668 – ADM – B2364/28

 

Les biens de Meilbourg 1680 - ADM - 3E7586

 

ATTENTION 

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